Ce beau film est hors norme, comme son personnage principal, qui n’a pas voulu d’une œuvre à sa gloire au moment de quitter la politique, mais d’un documentaire vivant sur les questions vitales que se posent les Québécois, plus nombreux qu’on pense.
Elle a donc parcouru non seulement la Ville de Québec, avec son complice Sol Zanetti, pour des rencontres heureuses marquées de sourires et de métissages, mais aussi la circonscription mi-rurale de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, à l’invitation de sa jeune collègue Émilise Lessard-Therrien qu’on voit, avec ses enfants, attelée à un métier de tissage, puis qui pose la question à des personnes âgées rassemblées dans un restaurant ouvrier : que privilégiez-vous, la liberté ou le confort? La réponse qui semble satisfaire tout le monde est la liberté …avec suffisamment d’argent pour avoir le temps de s’arrêter afin de …poser la question.
« Le film donne la parole aux citoyens pour tenter de définir un projet de société fondamental venu des entrailles du peuple ». Aux prises, surtout en pandémie, avec un état d’urgence permanent qui appelle à performer et à désespérer, déchirés par les écarts de richesses indécents et les pouvoirs qui tassent les petits, Catherine, en passionnée rassembleuse alors qu’on a tant tenté de la discréditer pour son excentricité, propose de prendre le temps de côtoyer le voisinage : les anciens paroissiens rassemblés par le désir de renouer, titre génialement trouvé, qui remplace la religion afin de tisser de nouveaux liens et amener des réconciliations, résumé que l’auteur de cet article, a proposé à une salle restée une demi-heure après le film pour échanger les impressions qui fusaient, toutes positives, au grand plaisir de la député locale, Christine Labrie.
Le film regorge de scènes quasi-panthéistes où les solidaires voguent en canoës sur nos rivières et nos lacs, se réchauffent près de feux de bois sous les étoiles, parcourent les forêts, scrutent les nuages au risque de se voir accuser de les pelleter, creusent la neige et se rassemblent pour piqueniquer sur des tables où on vient de langer les bébés étonnamment calmes, hypnotisés par l’atmosphère d’entraide souriante.
Renouer avec les autochtones qui nous ont accueillis il y a un demi-millénaire, briser l’isolement qui est le fait de la plus grande pauvreté, « alimenter l’espoir, l’amour en premier, le reste après, et pour la suite du monde et de la culture », échanger entre nous, camionneurs, cyclistes, marcheurs, anglophones, toutes générations, tous genres, toutes races unies et pas seulement pour partager nos joies, pour partager aussi nos souffrances du fait de la pollution et du réchauffement climatique. Et trouver l’énergie de les combattre par l’exigence d’une politique pure, libérée de l’obsession du Dieu de l’Argent.
J’écris comme drogué par l’atmosphère unique de la salle au sortir de ce film captivant. On trouvera le film itinérant projeté en diverses salles pour, avant les élections, être diffusé à la grandeur du Québec. En attendant, voici la bande-annonce.
Jeudi, j’ai rencontré Catherine pour la première fois à Sherbrooke, avant la projection du film dont je parle ci-dessus et lui ai dit : « les Artistes pour la Paix se cherchent une présidente! » Vu la censure des médias en particulier de Québec, elle n’avait probablement jamais entendu parler de nous autres, mais elle m’a souri et Christine Labrie qui nous connaît un tout petit peu a éclaté de rire, moitié joie pure, moitié dérision. Pour mieux connaître Catherine, on écoutera un très grand moment de connexion arts-politique non pas populiste mais authentiquement populaire, son discours du 1er avril pour annoncer aux gens de Taschereau qu’elle ne se représenterait pas aux prochaines élections.
La dernière fois que j’ai fait de la politique, c’était du porte-à-porte pendant un mois dans Mercier pour parler avec des centaines de personnes en 1973 à mon retour de Los Angeles (maîtrise à USC), un comté qui allait élire et réélire Gérald Godin, Daniel Turp, Amir Khadir, Ruba Ghazal…
Écoutez le discours de Catherine, un grand moment de politique, au moment où d’autres fabuleux authentiques tels que Véronique Hivon et Sylvain Gaudreault s’apprêtent à quitter l’Assemblée Nationale.