Par Radio-Canada, qui a «oublié » de mentionner qu’Aquil était l’Artiste pour la Paix 2018

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Aquil Virani peint le portrait d’Azzeddine Soufiane, épicier, 57 ans. Photo : Aquil Virani

Camille Feireisen

Pour souligner le cinquième anniversaire de la tragédie à la grande mosquée de Québec, l’artiste canadien Aquil Virani a réalisé des peintures en hommage aux six personnes tuées lors de l’attentat du 29 janvier 2017. Les œuvres sont exposées dès samedi au Centre culturel islamique de Québec, puis seront offertes aux familles des disparus.

« Pour moi l’art, c’est contribuer et donner à la communauté », explique Aquil Virani, originaire de Surrey, en Colombie-Britannique; il vit à Toronto depuis quelques années. Son père est musulman et originaire d’Inde et sa mère française.

La série de portraits qu’il expose à la grande mosquée de Québec a une signification particulière pour lui et c’est aussi le résultat d’une rencontre amicale et de liens forts qui se sont tissés avec la communauté musulmane de la capitale québécoise.

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Aquil Virani, artiste visuel basé à Toronto. Photo : Radio-Canada

« C’est un projet puissant pour moi parce que je suis musulman, mon père m’a amené à la mosquée quand j’étais jeune. J’ai souvent pensé que ça aurait pu être mon père, ce jour-là. » — Une citation d’Aquil Virani, artiste visuel

Pour l’artiste, il s’agit également de contribuer aussi à la mémoire collective, en rappelant les noms, mais aussi les visages des disparus : Ibrahim Barry, Abdelkrim Hassane, Mamadou Tanou Barry, Aboubaker Thabti, Azzedine Soufiane, Khaled Belkacemi.

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Mamadou Tanou Barry, 42 ans. Photo : Radio-Canada / Steve Breton

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Aboubaker Thabti, 44 ans. Photo : Radio-Canada / Steve Breton

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Ibrahima Barry et Hassane Abdelkrim. Photo : Steve Breton

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Khaled Belkacemi, 60 ans, professeur Université Laval. Photo : Radio-Canada/Steve Breton

Tout a commencé le lendemain de la tuerie, lors du rassemblement de solidarité envers les musulmans de Québec organisé à la station de métro Parc, à Montréal. Aquil Virani vivait alors dans la métropole et y a participé. Il y avait créé une oeuvre collaborative, Stronger Together, une peinture représentant les mains d’une personne musulmane en train de prier. J’ai demandé aux gens présents lors de la veillée d’écrire des messages d’espoir et de solidarité sur la toile, raconte Aquil Virani.

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Stronger Together, oeuvre créée par Aquil Virani durant la veillée de solidarité qui s’est tenue à Montréal au lendemain de l’attaque à la grande mosquée de Québec. Photo : Aquil Virani

C’est à ce moment qu’Aquil a rencontré une femme musulmane qui l’a mis en contact avec Amira Bahmed, originaire de Québec et vivant aussi à Montréal. Elle l’a aidé à livrer Stronger Together à la grande mosquée. C’était le début d’une belle relation avec la communauté musulmane à Québec, explique l’artiste.

La genèse d’un projet

L’année suivante, il réalise une série de portraits de femmes canadiennes pour le corpus Célébrons-la (CelebrateHer). Parmi ces portraits, il y avait la mère d’Amira Bahmed, Zébida Bendjeddou.

« Une des veuves de la tuerie de Québec a vu le portrait de Zébida et elle a demandé si je pouvais être intéressé à créer une série de portraits commémoratifs.» — Une citation d’Aquil Virani

Amira Bahmed est aussi coordonnatrice au Québec pour l’organisme communautaire TakingITGlobal et a pu aider Aquil Virani à recevoir une bourse fédérale de 1500 $ pour réaliser son projet.

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Zébida Bendjeddou, portrait peint par Aquil Virani. Photo : Amira Bahmed

Ce sont Amira et Zébida, qui ont ensuite fait le lien entre l’artiste et les familles des victimes. C’est vraiment ma mère qui a fait le contact avec les familles, elle les connaît tous. Ça a été un long processus de communication, parce qu’on demandait, quand même, d’aller fouiller dans des photos et des souvenirs, raconte Amira Bahmed.

Les veuves ont donné des photos de référence à l’artiste, à partir desquelles il a pu constituer les portraits. Mais Aquil Virani a aussi eu des échanges par courriel avec chacune d’elles. J’ai rencontré la famille de Khaled Belkacemi à Québec, on a passé un après-midi ensemble, ajoute-t-il.

Aquil Virani raconte qu’il était important pour lui de parler aux familles et d’en apprendre davantage sur les victimes, la situation est délicate à cause de la tragédie et je voulais respecter cette délicatesse, souligne-t-il. J’ai souvent pensé durant le processus à la situation des photos, leur contexte, l’environnement dans lesquelles elles ont été prises, la plupart du temps c’était dans le quotidien. Personne ne savait ce qui allait se passer, dit l’artiste. Son objectif, à travers son art, est de montrer l’humanité de chacun de ces hommes. Ils avaient des vies bien remplies, pleines de complexité, d’espoirs et de rêves, dit Aquil Virani. Selon lui, c’est dans les traits du visage qu’on peut lire cette humanité et cette complexité et c’est ce qu’il a voulu montrer ici.

« Pour moi le projet c’est de mettre au centre les victimes et les visages des victimes. »
— Une citation de  Aquil Virani, artiste visuel

Amira Bahmed se souvient de la réaction de l’une des veuves lorsque son organisme est venu lui présenter le portrait de son défunt époux. Sa femme s’est rappelé le moment où avait été prise la photo, elle a commencé à nous raconter. Ce n’était pas triste, ça lui a permis de revivre un beau moment à travers le portrait. C’est vraiment pour dire à quel point Aquil a réussi à transmettre la personnalité de son mari à travers ce portrait, dit Amira Bahmed.

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Amira Bahmed est aussi coordonnatrice au Québec pour l’organisme communautaire TakingITGlobal . Photo : Radio-Canada

Elle ajoute que c’est la force de l’artiste, selon elle, d’avoir réussi à faire ressortir la personnalité de chacune des victimes, à travers leur sourire, leur posture et leur regard.

« C’est un peu le « Je me souviens ». On ne vous oubliera pas. Vous êtes là, vous êtes grands, vous êtes imposants, vous rayonnez. Vous rayonnez par votre sourire. Une des victimes c’est ses yeux qui sourient. Je ne l’ai jamais rencontré, mais je le sais en voyant ce portrait. » — Une citation d’Amira Bahmed

Il y a aussi le portrait d’un homme que je connais depuis que je suis toute jeune. Il sourit toujours, parce que c’est quelqu’un de doux, de calme, ajoute-t-elle.

Vous voyez, je parle encore au présent, je me souviens de lui mais pas dans le passé, c’est du présent. On a un jeune artiste qui a pensé à vous représenter et on pourra toujours se rappeler que vous aviez des yeux qui souriaient.

Les portraits ont été peints sur toile à l’acrylique et la bombe aérosol. Ils mesurent 75 cm par 165 cm (30 po x 65 po). Il y a du vert, couleur de l’Islam et du jaune, qui symbolise l’espoir pour l’artiste. Ils seront exposés une ou deux semaines à la mosquée puis offerts aux familles.

Soulignons que le 29 janvier restera dans nos souvenirs non pas comme le jour où les camionneurs ont débarqué à Ottawa, mais comme le jour du 5e anniversaire d’un événement de haine irraisonnée extrême, suscitée par des dérapages racistes de radios-poubelles. Cette haine est rachetée en partie par le geste généreux d’Aquil Virani qui la transforme en souvenir humain douloureux, certes, mais que son cœur et son talent feront résonner longtemps auprès des familles endeuillées.

Félicitons LA RESPONSABILITÉ DE NOS ÉLUS DÉMOCRATIQUES qui ont senti l’importance de se rassembler en une cérémonie à Québec en partie télévisée, afin de réconforter la communauté musulmane qui s’est aussi souvenue des événements de London, Ontario [1]. Présents à cette cérémonie : le chef Ghislain Picard, que les communautés membres de l’Assemblée des Premières Nations du Québec-Labrador (APNQL) viennent de réélire pour un onzième mandat, un témoignage formidable de sa force tranquille, les Premiers ministres du Québec et du Canada, MM Legault et Trudeau, ainsi que le nouveau maire de Québec Bruno Marchand, dont le discours bien senti rappelait ceux de son prédécesseur Régis Labeaume.

Si les APLP étaient subventionnés, nous aurions fait le voyage à Québec afin d’aider Aquil Virani pour son témoignage artistique. Nous remercions Amira Bahmed, coordonnatrice au Québec pour l’organisme communautaire Taking IT Global d’avoir piloté le projet.

P. Jasmin, secrétaire-général des APLP

PS Notre appui fraternel à la communauté musulmane n’empêche pas une bonne partie de nos membres d’être en faveur de la loi 21 sur la laïcité, qui favorise l’égalité de tous les citoyens et CITOYENNES, et de s’opposer, comme le mouvement École ensemble, aux subventions gouvernementales québécoises aux écoles privées religieuses et autres, ce dont la conservatrice Ontario s’abstient. Car un meilleur système public, tant en santé qu’en éducation, n’est-il pas garant d’un meilleur VIVRE ENSEMBLE ?


[1] Salam Aleykoum http://www.artistespourlapaix.org/?p=20369