Nathan McDonnell (English text follows) du réseau de solidarité kurde lance un cri de détresse, pour qu’on manifeste à Montréal en faveur des Kurdes bombardés par la Turquie : après le 27 Janvier, nouvel appel pour le 3 février à 11 heures à la Place des Arts.
« Rejoignez la manifestation d’urgence contre le gouvernement fasciste turc qui bombarde depuis les airs et au sol le canton d’Afrine (Syrie), peuplé de Kurdes, d’Assyro-Chaldéens et d’Arabes ». Car les forces turques qui encadrent plus d’un millier de djihadistes issus d’Al Nosra ou d’Al Qaïda viennent d’y lancer une sauvage agression contre ce pilier de la résistance kurde. Dimanche et lundi les 21 et 22 janvier, les tirs d’artillerie et les bombardements de l’aviation turque ont fait treize morts parmi les civils et de nombreux blessés (agence Reuters). L’offensive s’est concentrée sur la ville d’Afrine, sur les villages environnants et sur un camp de réfugiés.
« La Turquie tente par tous les moyens d’instaurer la terreur contre un peuple qui n’a jamais constitué le moindre danger pour Ankara, si ce n’est de tenter de bâtir une société démocratique et pacifique. Cette invasion ouvre un nouveau chapitre de la guerre en Syrie alors que la lutte contre l’organisation de l’État Islamique semblait arriver à son terme. Les Kurdes ont joué, aux côtés de la coalition, un rôle déterminant dans l’éradication de la barbarie obscurantiste. La Turquie sème le chaos dans une Syrie déjà meurtrie par 7 années de guerre ».
Tout en rappelant notre article http://www.artistespourlapaix.org/?p=13292 , en voici un autre ci-dessous, partagé par les membres des Conférences internationales pour la Science et les Affaires mondiales Pugwash, qui prennent connaissance des informations qui y sont contenues, sans endosser tous les éléments de cette analyse politique aussi confuse que la réalité sur le terrain. Mais il faut en retenir le grand danger, que nous avions déjà dénoncé, de la présence de bombes nucléaires de l’OTAN dans la région toute proche des bombardements :
ALEX LOCKIE
JAN 23, 2018, 4:45 AM
The US and Turkey are on opposite sides of a conflict in Syria, with Turkey bombing US-backed forces that helped defeat ISIS. Turkey has had a growing list of grievances with the US for years, and many have picked up on the rift as Turkey drifts closer to NATO. The US has dozens of nuclear weapons stockpiled in a Turkish air base, and experts have questioned the wisdom behind that, as Turkey appears become increasingly hostile to the West.
The US and Turkey, both NATO countries and allies for decades, began fighting a proxy war in Syria over the weekend. Turkish jets pummelled US-backed forces in Sryia’s north – all while Turkey holds one of the US’s most important bases and dozens of US nukes.
Turkey targeted the YPG, a Kurdish element of the Syrian Democratic Forces, one of the largest and most effective fighting forces that the US trained, equipped, and supported with air strikes during the successful three-year campaign to degrade and destroy ISIS’ caliphate in Iraq and Syria.Turkey’s motivation to destroy the Kurdish fighters comes from their alleged connection to the PKK, a Kurdish group responsible for terror attacks in Turkey that both Washington and Ankara consider a terror group.
After the US announced, and then walked back, plans to create a 30,000 strong border policing force comprised of the Kurdish and other fighters, Turkey quickly said it would fight against the Kurds. In the span of a few days, Turkish jets and tanks poured over Syria’s border and dropped bombs as artillery pieces shelled the Afrin, where the YPG intended to set up its border force. A spokesman for the SDF said on Monday that the strikes had killed 18 and wounded 23, according to Reuters.In response, a rocketed fired from Afrin hit a Turkish camp where the Free Syrian Army, backed by Ankara, sustained 12 losses, the Dogan news agency reported. Now it looks like the US could up fighting a proxy war against Turkey, a NATO ally that holds dozens of US tactical nuclear weapons.
If the US decided to provide air cover for its allies in Afrin, it would likely launch those planes from Incirlik Air Base, which is inside Turkey. Incirlik is a central hub for US air power in the region and the resting place of a few dozen B-61 nuclear gravity bombs with adjustable yields. Though the bombs are securely confined to the US-controlled side of the base, regularly maintained and looked after, and at little risk of falling into enemy hands, experts have long questioned the wisdom of holding US nuclear weapons in Turkey.
Issues surrounding Turkey’s stability as a US ally arose during the attempted coup of July 2016, and have only grown during the Turkish President Tayyip Erdogan’s crackdown on tens of thousands of citizens for suspected anti-government activities. In April 2017, Erdogan gained a sweeping new set of powers under a constitutional referendum, which he used to consolidate power and continue his attacks on political enemies. Throughout the entire coup and aftermath, Turkey has maintained that a cleric harbored by the US organised the coup.
Turkey’s drift from democratic Western-leaning principals, into what looks more and more like a religious autocracy has been well documented over the years. Also starting in 2016, Turkey began its drift from NATO and towards Russia. Turkey and Germany, a key NATO figure, feud frequently over Erdogan’s influence on Turks in Germany. Recently, Turkey chose a Russian-made missile defence system over NATO types, despite the fact that the Russian system can’t network with Turkey’s existing NATO infrastructure.
Les Kurdes trahis par l’Occident
1 février 2018 |André Poupart | Actualités internationales Le Devoir
«Ces jours-ci, c’est à Afrine, au nord-ouest de la Syrie, que l’horreur contre les Kurdes s’est déplacée. Sans aucun droit, sans avoir été attaquée, l’armée turque a traversé la frontière avec la Syrie pour liquider les militaires kurdes qui s’y trouvent et qui encadrent la population», décrit l’auteur.
J’ai eu le privilège d’être invité au Kurdistan d’Irak à six reprises pour des séjours plus ou moins prolongés à titre de conseiller, de professeur et de conférencier. La première fois en passant par la Syrie et en traversant le Tigre dans une barque (type chaloupe Verchère) ; ensuite, à travers la Turquie, de Diyarbakir à Barbour, le poste-frontière ; et enfin, directement d’Europe à Erbil, au Kurdistan, par avion Airbus.
J’ai été témoin de la transformation et de la modernisation du Kurdistan : du plus évident (amélioration du réseau routier, transformation du parc immobilier privé et public, construction d’un aéroport international et développement des services connexes) au plus fondamental (constitution d’une assemblée nationale multipartite, de nouvelles universités de meilleure qualité et accessibles, d’un système de santé adéquat). Tout était encore loin d’être parfait au moment où le prix du pétrole s’est effondré, perdant la moitié de sa valeur et privant le Kurdistan des ressources nécessaires à la poursuite de sa modernisation. Mais la crise a été gérée.
C’est dans ce contexte que les Kurdes ont été les premiers à affronter les forces militaires du groupe État islamique (Daesh) et à accueillir des centaines de milliers de réfugiés (sunnites, chrétiens, yézidis) qui essayaient simplement de survivre dans un chaos invraisemblable. Il n’y a pas de témoignage plus significatif de la qualité et de la réussite du projet kurde que l’arrivée de ces centaines de milliers de réfugiés irakiens (y compris le gouverneur de la province de Mossoul) qui ont choisi Erbil plutôt que Bagdad pour protéger leur vie et défendre leurs droits.
L’Occident a été très heureux que plus de meurtres, de viols et d’atrocités soient ainsi évités. L’Occident — ses chaînes de télévision, ses journalistes, ses porte-parole politiques — a sans cesse rendu hommage au courage des peshmergas qui ont affronté, au sol, au prix de milliers de morts, les combattants du groupe EI qui avaient fait fuir les armées syrienne et irakienne.
Autre solution possible
Aujourd’hui, ceux qui se sont sacrifiés pour la défense des valeurs mises en avant par l’Occident (le respect de la vie, la liberté de conscience et de religion, l’égalité homme-femme) sont eux-mêmes sacrifiés sur l’autel des intérêts financiers et stratégiques des États les plus forts, du respect de frontières coloniales (Sykes/Picot) autrement décriées par tous et d’un ordre politique qui n’est que désordre, exactions et souffrances pour le plus grand nombre.
Après avoir étranglé le Kurdistan au lendemain de son référendum indicatif en bouclant toutes ses frontières, la Turquie, l’Iran et l’Irak veulent mettre fin au processus de développement d’un pays respectueux de la diversité et de la liberté ; d’un pays laïc non fondé sur la religion et le sectarisme ; d’un pays qui démontre qu’une autre solution est possible dans une région minée par le cancer de l’intolérance.
Ces jours-ci, c’est à Afrine, au nord-ouest de la Syrie, que l’horreur contre les Kurdes s’est déplacée. Sans aucun droit, sans avoir été attaquée, l’armée turque a traversé la frontière avec la Syrie pour liquider les militaires kurdes qui s’y trouvent et qui encadrent la population. Erdogan poursuit sa vendetta contre ses concitoyens kurdes jusque chez son voisin syrien, qu’il envahit sans droit. L’Occident, les États-Unis et surtout l’Europe restent silencieux devant cette invasion et ce massacre annoncé. L’Europe aurait-elle peur que la Turquie laisse partir des milliers de réfugiés qui n’attendent que l’occasion de reprendre les routes boueuses et enneigées de l’Europe vers un avenir meilleur ?
La parole reniée de l’Occident
Dans ces conflits en Syrie et en Irak, l’Occident a déjà trop souvent renié ses engagements et ses valeurs proclamées. La Bonne Parole occidentale, ses appels au respect de la vie, de la liberté, de la justice sonnent de plus en plus creux, ne masquant que la fluctuation d’intérêts successifs conjoncturels. La crise actuelle et les massacres qui l’accompagnent ne sont pas qu’au Moyen-Orient, mais aussi à Washington, à Paris et autres capitales, y compris à Ottawa. Il est plus que temps de faire concorder nos discours et nos actes.