L’ONU suprême arbitre

Par les Artistes pour la Paix – 6 mars 2024

 

Même les kibboutz traditionnellement socialistes de gauche ont abandonné tout sentiment de solidarité envers les Palestiniens, suite à l’attaque du Hamas du 7 octobre. Photo du kibboutz Zikim, au nord de la bande de Gaza, fondé en 1949 par des membres du mouvement Hashomer Hatzair sur les terres du village palestinien de Hirbiya. La maison au premier plan est connue sous le nom de « Alami House », du nom de la famille palestinienne qui la possédait avant la Nakba. Depuis que cette photo a été prise en 2017, cette maison a été transformée en centre d’accueil pour le kibboutz. (Photo : Zeev Stein/Wikimedia)

Merci au Figaro pour les infos suivantes.

Guerre Hamas-Israël : l’État hébreu rappelle son ambassadeur auprès de l’ONU

Les tensions sont encore montées lundi entre Israël, qui a accusé l’UNRWA d’employer «plus de 450 terroristes» à Gaza, et l’agence onusienne qui a rapporté des «tortures» subies par ses employés arrêtés dans le territoire palestinien.

L’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) est au centre d’une controverse depuis qu’Israël a accusé fin janvier douze de ses employés d’implication dans l’attaque du Hamas le 7 octobre qui a entraîné la mort de 1160 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l’AFP. Ces accusations d’Israël ont entraîné la suspension des financements par une quinzaine de pays donateurs dont le Canada, même si l’ONU s’était immédiatement séparée des employés accusés, avait lancé une enquête interne et confié à un groupe indépendant une mission d’évaluation de l’UNRWA et de sa «neutralité».

L’ONU note que, pour l’instant, Israël n’a partagé aucune preuve de ses accusations avec les enquêteurs ou avec l’UNRWA, qui emploie quelque 30.000 personnes dans les territoires palestiniens, au Liban, en Jordanie et en Syrie. De son côté, l’agence onusienne a accusé les autorités israéliennes d’avoir commis des actes de «torture» contre certains de ses employés arrêtés dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre.

Rappel de principes onusiens par les Artistes pour la Paix

Les accusations démesurées (de 12 à 450 « terroristes onusiens »!!) d’un pays soupçonné d’actes génocidaires par la Cour Internationale de Justice est une tactique honteuse d’échapper à ses responsabilités et devoirs dictés par l’ONU.

Signé le 24 octobre 1945, l’article 2, paragraphe 4, du chapitre I de la Charte des Nations unies interdit « la menace ou l’emploi de la force dans les relations internationales ». Il appelle également « tous les membres à respecter la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’indépendance politique des autres États ».

En 1960, la déclaration n° 1594 de l’Assemblée générale garantissait l’indépendance des nations et des peuples colonisés, condamnant l’usage de la force contre les mouvements de libération. Même si la Charte des Nations unies ne s’applique qu’aux membres à part entière de l’ONU, le droit palestinien à l’autodéfense pouvait être établi en vertu du droit international.

En 1964, l’Assemblée générale des Nations unies a voté en faveur de la résolution n° 2105, reconnaissant la légitimité de la « lutte » des nations colonisées pour exercer leur droit à l’autodétermination.

Le 22 novembre 1974, la résolution 3236 de l’Assemblée générale des Nations unies « a affirmé le droit inaliénable du peuple palestinien en Palestine (…), le droit à l’autodétermination, (et) le droit à l’indépendance et à la souveraineté nationales ».

En 1983, l’Assemblée a adopté la résolution 38/17 : les peuples ont le droit de lutter contre la domination étrangère coloniale par tous les moyens possibles, y compris la lutte armée.

En novembre 2012, la Palestine est reconnue comme État observateur à l’ONU, également membre de traités internationaux et reconnue par 139 des 193 pays membres de l’ONU.

Le 29 décembre 2023, la Chine a appelé le Conseil de Sécurité de l’ONU à reconnaître l’État palestinien à part entière (reconnaissance défaite par véto américain) pour qu’il puisse négocier une paix d’égal à égal avec Israël, avec la solution à deux états que même le secrétaire américain Blinken invoque en appui au regretté Yitzhak Rabin, assassiné par un Juif d’extrême-droite, une mouvance appuyée par Nétanyahou aujourd’hui.

Le 26 janvier 2024, la Cour internationale de justice (CIJ) a affirmé que les Palestiniens constituent un « groupe national, ethnique, racial ou religieux » distinct.

Accablants reproches

Les Palestiniens ont été victimes du colonialisme israélien, de l’occupation militaire, de l’apartheid raciste et maintenant, d’un siège militaire commettant les pires atrocités.

Merci à Jamal Kanj :

Permettez-moi de commencer cet article en partageant l’histoire d’une enfant de Gaza. Contrairement à votre enfant, votre sœur ou votre nièce, Hind Rajab n’a pas vécu jusqu’à son sixième anniversaire. Les enfants de son âge ont généralement de grands projets, ils attendent avec impatience de commencer l’école et s’attaquent peut-être au défi de terminer un jeu de Lego. À six ans, Hind a pourtant regardé la mort dans les yeux, à travers le canon noir et béant d’une mitrailleuse israélienne.

L’oncle de Hind, Bashar Hamada, conduisait une Kia Picanto noire avec sa femme et leurs enfants : Sarah, 4 ans, Mohammed, 11 ans, Raghad, 12 ans, Sana, 13 ans, Layan, 15 ans, et leur cousine Hind, 6 ans. Bashar a obéi aux ordres d’Israël, cherchant une « zone de sécurité » pour sa famille et sa nièce à Gaza. N’ayant plus de place dans la petite voiture bondée, la mère et les frères et sœurs aînés de Hind ont fui à pied.

Le 29 janvier, il était un peu plus d’une heure de l’après-midi lorsqu’un char israélien a bloqué la route devant la voiture. Bashar agite frénétiquement un drapeau blanc. La mitrailleuse de la tourelle est braquée sur la voiture. Le labyrinthe de la toile d’araignée du viseur de la mitrailleuse protège le visage du tireur. Le char pivote rapidement son canon lourd en direction de la voiture. L’inquiétant trou noir de 120 mm se braque sur eux. Les enfants poussent des cris de terreur. Soudain, une fusée éclairante et une boule de feu jaillissent de la mitrailleuse. Des rafales de balles brisent le pare-brise, des balles ricochent sur la carrosserie de la voiture.

Hind s’est retrouvée entre le siège arrière et sa tante sur le siège avant. Layan, de l’autre côté de la banquette arrière, s’est calée derrière son père sur le siège du conducteur. Les corps de Sana et de Raghad rebondissent au gré des balles. Le sang chaud éclabousse leurs visages, Layan commence à saigner et Hind tremble de terreur, abritée sous le corps sans vie de son cousin Raghad.

À 14 h 28, Omar, du centre principal de transmission du Croissant-Rouge palestinien (CRP) à Ramallah, est en contact avec Layan, 15 ans.

-« Ils nous tirent dessus », ses cris sont assourdissants. « Le char est à côté de moi », dit-elle, horrifiée.

-« Est ce que tu te caches ? » demande Omar.

-Les coups de feu retentissent en arrière-plan ; Layan hurle. Puis, brusquement, la ligne s’est coupée.

En état de choc et traumatisé, Omar est allé chercher sa collègue, Rana Faqih, dans une autre pièce. Il lui raconte ce qu’il a entendu. Le cœur battant dans sa poitrine, Rana l’a ramené à la

salle de répartition et lui a demandé d’appeler le numéro. Ses doigts tremblent sur le clavier tandis qu’il compose le numéro de téléphone, désespéré d’avoir un signe de vie à l’autre bout du fil.

Cette fois, c’est Hind qui répond au téléphone. Sa voix est instable.

-« Tu es dans la voiture maintenant ? » lui demande-t-il.

-« Oui », répond la petite voix à l’autre bout du fil.

Omar passe le téléphone à Rana, qui assure gentiment à Hind qu’elle restera en ligne avec elle jusqu’à l’arrivée des secours.

-La voix de Hind est grésillante, Rana ne comprend pas.

-« Avec qui es-tu ? » demanda Rana.

-« Avec ma famille », dit Hind d’une voix tremblante.

Rana demande à Hind ce qu’il en est des autres occupants de la voiture.

-« Ils sont morts », dit une voix stridente de l’autre côté.

-« Comment la voiture a-t-elle été touchée ? » demande Rana.

-« Un char d’assaut ». Hind respire difficilement. « Le char est à côté de moi… il vient vers moi… il est près, tout près », s’écrie-t-elle, désespérée.

Vers 15 heures, les collègues de Rana à Gaza ont localisé la voiture près de l’université Al-Azhar. Cependant, l’accès à une ambulance dans une zone militaire fermée nécessite l’autorisation de l’armée israélienne. Rana a immédiatement contacté un fonctionnaire du ministère palestinien de la santé (PMH), lui indiquant l’emplacement de Hind et demandant à l’armée israélienne l’autorisation d’envoyer une ambulance. Le fonctionnaire du ministère de la santé, Fathi Abu Warda, a ensuite contacté le coordinateur des activités gouvernementales dans les territoires (COGAT) afin de garantir un passage sûr pour les ambulanciers.

Dans l’attente anxieuse d’une réponse, Rana est resté en ligne avec Hind. Les heures se sont écoulées depuis le contact d’Abu Warda avec le COGAT, le froid et l’obscurité ont suivi le coucher de soleil menaçant.

-« J’ai peur du noir », dit Hind en frissonnant.

-« Y a-t-il des coups de feu autour de vous ? » demande Rana.

-« Oui, viens me chercher », implore encore Hind. « J’ai tellement peur, s’il te plaît, viens. » Rana est impuissante. Vers 18h00, le COGAT a donné au responsable de la PMH l’autorisation d’envoyer une ambulance. Le feu vert étant enfin donné, le PCRS a jugé qu’il était suffisamment sûr pour envoyer une équipe de deux personnes, Youssef Zeino et Ahmed Al-Madhoon.

L’ambulance s’approche à quelques mètres de la Kia. Rana est soulagée, persuadée que Hind sera bientôt sauvée. Mais le rapport des ambulanciers au dispatcheur a anéanti ses espoirs : un char israélien les a pris pour cible avec un rayon laser. Des coups de feu et une forte explosion ont suivi. Puis, un silence inquiétant a enveloppé la scène. Le contact a été perdu avec l’équipe d’ambulanciers et Hind, plongeant Rana dans un état d’incertitude angoissant.

Pendant 12 jours angoissants, la mère de Hind a enduré le tourment de ne pas connaître le sort de son enfant de 6 ans et des deux hommes courageux qui avaient été autorisés par l’armée israélienne à la secourir. Contre toute attente, elle s’est accrochée à l’espoir, priant pour qu’ils soient détenus par l’armée israélienne. Chaque fois qu’elle entendait la sirène d’une ambulance ou qu’elle apercevait des lumières stroboscopiques clignotantes, son cœur battait la chamade, pensant qu’il s’agissait peut-être enfin de Hind.

Le 13ème jour, et après que les chars israéliens eurent finalement nettoyé la zone, la Kia a été découverte, portant les sinistres vestiges de la tragédie. Parmi les corps décomposés de deux adultes et de six enfants, la petite forme décomposée de Hind a été trouvée derrière le siège du passager avant. À quelques mètres de là, au milieu des ruines de l’ambulance incendiée, gisent les restes carbonisés des deux ambulanciers, leurs corps entrelacés dans les débris mêlés.

Si Hind avait été Kateryna d’Ukraine ou une Israélienne, son visage aurait fait le tour des télévisions occidentales. Les médias dits « libres » se seraient empressés d’interviewer sa mère et tous les membres survivants de sa famille. Pourtant, (…) Hind, née de deux parents déplacés, a enduré une vie de dénuement et a finalement été assassinée par un tireur de char israélien. Sa mémoire a été étouffée par des médias occidentaux « libres », intimidés (…) pour ne pas être qualifiés d’« antisémites » s’ils dénonçaient les atrocités et les injustices commises par les Israéliens.

Hind, sa famille et les ambulanciers n’étaient pas une exception dans la guerre d’« Israël » contre les civils. Ils ont été assassinés selon les mêmes prétendues « règles d’engagement israéliennes » qui ont tué les trois captifs israéliens en fuite qui agitaient un drapeau blanc dans les rues de Gaza. Après tout, l’armée israélienne est le produit d’une culture qui se manifeste par des déclarations comme celles du président israélien qui a déclaré que c’est « toute la nation qui est responsable… ». Hind n’est que l’un des 12 000 enfants dont Netanyahu a juré, le 28 octobre 2023, qu’ils subiraient une vengeance imminente.

Les grands médias occidentaux, ainsi que les gouvernements, sont directement complices du crime de guerre de M. Netanyahu, sur les plans diplomatiques, financiers et militaires, dans le cadre du génocide. En outre, les médias sont devenus un outil de relations publiques israélien, se conformant aux directives de ne pas envoyer de correspondants pour couvrir le conflit depuis l’intérieur de la bande de Gaza, préférant intégrer leurs reporters à l’armée israélienne et ne rendre compte que de ce qu’« Israël » leur permet de voir.

Tout cela a renforcé le biais cognitif apparent du président américain Joe Biden et des dirigeants occidentaux en général, car leur interprétation de la réalité à Gaza, et en Palestine en général, est déterminée par des croyances préconçues, quelles que soient les preuves du contraire. De même, les médias occidentaux « libres » continuent de commercialiser les mensonges israéliens, créant ainsi un décalage avec la réalité en façonnant les perspectives et les perceptions des individus d’une manière qui s’écarte de la réalité objective.

Par exemple, en l’absence de cibles militaires fixes dans une guerre de guérilla, les médias occidentaux se sont fait l’écho sans critique des mensonges israéliens, présentant les centres médicaux comme de prétendus centres de commandement, justifiant ainsi les actions israéliennes visant à mettre hors service des installations médicales vitales, en arrêtant le personnel médical sous de faux prétextes, en violation flagrante du droit international. Cela a entraîné la mort de nourrissons en couveuses et de blessés privés d’oxygène et d’assistance respiratoire. Ce schéma s’est poursuivi au fur et à mesure que les forces israéliennes avançaient d’un grand hôpital (objectif militaire supposé) à l’autre, pour finalement atteindre Rafah, à la frontière sud de Gaza.

Rafah, désignée à l’origine par « Israël » comme une « zone de sécurité », est une zone de 23 miles carrés (60 km²) et abrite actuellement 1,4 million de personnes, soit environ 61 000 personnes par mile carré. Parmi ces personnes, 71 % ont été déplacées de force par « Israël » du centre et du nord de la bande de Gaza.

La stratégie israélienne consistant à désigner une région frontalière comme « zone de sécurité », à la surpeupler de personnes déplacées, puis à changer unilatéralement la désignation en théâtre de guerre, fait partie de l’objectif ultime d’« Israël » de nettoyer ethniquement les Palestiniens à travers le désert du Sinaï.

Malgré tout cela, la réalité déformée perpétuée par un racisme occidental profondément enraciné, empêche l’Occident de reconnaître le lien évident entre les atrocités modernes commises par Israël et la conviction métaphysique vieille de 3 000 ans de provoquer une destruction totale et « … de mettre à mort hommes et femmes, enfants et nourrissons, bovins et ovins, chameaux et ânes ». Et pousser ceux qui survivent à quitter leurs maisons dans une répétition de la « Nakba » de 1948 pour se réfugier à l’étranger.

Avec l’appui des Etats-Unis au nouveau faux prophète israélien, les tergiversations européennes et l’impuissance de la communauté internationale, plus particulièrement des nations arabes et musulmanes, Rafah pourrait bien servir de dernier rempart pour résister à l’intraitable croisade « céleste » de Netanyahu dans la phase finale du génocide biblique israélien contre le nouvel « Amalek » de Gaza.

Auteur : Jamal Kanj est l’auteur de « Children of Catastrophe, Journey from a Palestinian Refugee Camp to America », et d’autres ouvrages. Il écrit fréquemment sur les questions relatives au monde arabe pour divers médias nationaux et internationaux.