Mais reconnaissons la chaleur irradiante du spectacle du 10, avec son accueil dès l’entrée assuré par Hélène Tremblay et Lynne Dionne, avec ses beaux éclairages (merci à Gérard Souvay et aux techniciens du Lion d’Or !) mettant en valeur musiciens et chanteurs s’accompagnant eux-mêmes, sauf en de rares exceptions, au piano et à la guitare, ce qui a permis à l’expérimentée metteure en scène Jo’ Clément des enchaînements fluides, malgré la densité des témoignages parlés. Un merci particulier au photographe Jean-François LeBlanc pour les photos qui accompagnent ce compte rendu, mais aussi pour les trente de son portfolio international qu’on découvrira avec émotion sur www.jfleblanc.com.
UNE PREMIÈRE PARTIE MILITANTE
Une atmosphère de quasi-clandestinité flottait dans l’air du temps (Zeitgeist de la sinistre affaire Ghomeshi), avec toutes ces révélations de femmes connues et autochtones violées, alors que parade, plusieurs heures par jour à la TV d’état, l’armée médaillée, dont on sait hélas qu’elle est championne des agressions sexuelles ici et dans les pays conquis.
En ouverture de la soirée, joué par le pianiste Pierre Jasmin, le premier mouvement de la sonate dite « Clair de lune » composée par Beethoven à l’âge de trente ans (l’âge des Artistes pour la Paix, a souligné Pierre) a inspiré à Izabella Marengo une poignante chorégraphie devant une sélection de non moins poignantes photos d’archives, dont plusieurs par Benoît Aquin. Merci à Christian Morin pour ce choix et l’enchaînement ! La chanteuse Sylva Balassanian aurait dû être présente, hélas victime d’un accident sans gravité qui l’a néanmoins conduite à l’hôpital.
Toutes ces personnes, avec à la boutonnière le coquelicot blanc symbole de complicité avec les victimes civiles des guerres, en particulier femmes, enfants et vieillards (merci au collectif Échec à la guerre!), se retrouvent au conseil d’administration des APLP, avec Daniel Gingras qui a lu les quelques lignes suivantes de Dany Laferrière, souvent présent à nos 14 février :
Nous sommes cette génération qui refuse qu’on tue un poulet dans un film, alors que nous nous asseyons tranquillement devant la télé pour regarder la guerre. Naturellement nous ne sommes pas d’accord mais que faisons-nous pour dire notre désaccord? Pas grand-chose. Et quand nous le clamons ce désaccord, on nous répond, par la bouche des experts en géographie, en économie, en histoire et en stratégie militaire, que c’est plus compliqué que nous le croyions. En fait ce n’est pas du tout compliqué : (…) la guerre est une si bonne affaire qu’il faut l’entretenir constamment. Souffler sur le feu. Un gouvernement en guerre ne connaît pas d’opposition. C’est aussi bon pour les marchands d’armes. C’est surtout bon pour tout système qui se nourrit de la peur de son peuple ou du pétrole de l’ennemi qu’il s’est inventé. En somme, c’est bon pour tout le monde, sauf pour les petits soldats qui vont crever sans même savoir pourquoi. Et la plus sinistre plaisanterie de l’État c’est encore de faire la guerre au nom de la paix.
Suit une des trente lauréates du concours ouvert dans la catégorie chanson pour la paix par l’infatigable Judi sur le site www.artistespourlapaix.org, Kyra Shaughnessy, qui nous a régalés de sa belle présence avec une de ses créations en français :
Si la mer vient effacer nos noms et qu’on laisse s’écrouler nos monuments
si on refuse la tyrannie des trajets et qu’on accepte de ne plus savoir rien
Alors que le feu laisse ses traces dans nos entrailles
que l’oubli passe sa main dans nos cheveux
que nos corps deviennent poésie
qu’enfin on se retrouve tout seuls ici
Qu’enfin on se retrouve
Tout seuls…
Si l’histoire est avalée par la lumière et qu’on laisse pousser nos ailes de fougères
Si nos sangs mélangés deviennent sève et qu’on s’effondre à l’orage de nos rêves
Alors que le feu laisse ses traces dans nos entrailles
Que l’oubli passe sa main dans nos cheveux
Que nos corps deviennent poésie
qu’enfin on se retrouve tout seuls ici
Qu’enfin on se retrouve
Tout seuls
Ici
Qu’enfin on se retrouve
Tout seul
Poésie maîtrisée par Kyra aussi en anglais, dans son album Waiting for the Light [centered on Rabindranath Tagore’s quote “faith is the bird that feels the light and sings while the dawn is still dark,” the album is a reminder of the healing potential, and inevitability, of change and the power of personal choice in social transformation].
Kyra a également travaillé sur un album aux saveurs autochtones avec Domlebo. Ce dernier, moins cowboy mais toujours fringant, s’empare de la scène avec son aisance habituelle à l’animation, parfois comique, parfois attendrissante, toujours vive et pertinente aux côtés de Judi, en s’écriant :
Le prochain invité vient de remporter le prix Eddy Marnay 2014 pour l’ « Excellence de l’imaginaire », il a été un des tout premiers Artistes pour la Paix, Raôul es-tu là? Raôul Duguay, mesdames et messieurs!
Du haut de la mezzanine, ce poète-philosophe-peintre-musicien-chanteur exceptionnel, parmi nos fondateurs il y a d’ailleurs plus de trente ans avec Georges Baudereau et Dolorès Duquette au premier rang de la foule attentive, débute son poème par les six mots passe-partout utilisés par les élèves paresseux de secondaire 1, procédé qui lui permet de mieux nous secouer ensuite avec l’horreur quotidienne des guerres, en terminant toutefois avec ce qui deviendra le leitmotiv d’amour de la soirée, une formule simple que les agresseurs sexuels devraient se répéter pour guérir :
Depuis que le monde est monde
Y’a même pas eu cent jours de paix
Et à toutes les cent secondes
Pendant qu’on se beurre le portrait
Ailleurs des milliers d’enfants
Impatients d’accoucher de la mort
Ailleurs au bout de leurs seins
Des mamans font du lait de leur sang
Mais ici maman la Nature
A les seins en crème un peu sure
Et pour le Tiers-Monde nos ordures
Feraient encore de la bonne confiture
Ailleurs des milliers d’enfants
Se font putains pour un peu de pain
Ailleurs des petits conquérants
Tirent du fusil dans des vagins
Mais ici à peine 200 humains
Assistés de 500,000 savants
Font du pain dont nous sommes le levain
Et leur vin est le fleuve de notre sang
Deux milliards de dollars par jour
Pour faire manger la mort à l’amour
Trente millions de militaires
Avec leurs gueules en canons sur la Terre
Paix !
La seule victoire c’est la paix
Pour l’amour de nous pour l’amour de la vie
Assez de morts et de blessés
L’arme suprême c’est l’amour
La force d’aimer est une force désarmée
Catherine Major tantôt chante l’intime et tantôt l’univers… et tout ce qu’il y a entre les deux. Tanguant avec toute la sensualité de ses moins de trente-cinq ans devant son piano qu’elle maîtrise comme nulle autre, elle entonne d’abord une chanson de son amour, père de ses deux enfants, Moran présent au spectacle, puis sa célèbre pièce Le désert des solitudes, et provoque le premier grand coup de cœur de la soirée :
Le sol est instable
Il faudra s’en méfier
Malgré la beauté
Du plancher
Le sol est instable
Il faudra l’éviter
Marcher désormais
C’est tomber
Dans le désert des solitudes
Souvent le sable est émouvant
Si les gitans ont l’habitude
D’y pleurer contre le vent
Je désavoue ma certitude
d’un chagrin plus élégant
Si je trouvais entre deux dunes
Une amour morte m’appartenant
Le sol est instable
À perte de vue
À perdre pieds nus
Sur le chemin tenu
Le sol est instable
À porter disparu
À laisser suspendu
Sans dessous cœur déçu
Le sol est instable
Autant que l’océan
Qu’importe l’important
Est ici maintenant
Le sol est instable
Mais le bonheur est patient
Contre marées et vents
Ferons-nous tourner le temps?
(Thanks to Sara Beaulieu for these lyrics)
Surfant sur ces derniers mots laissant apparaître enfin une éclaircie, voici le comédien Romain Pollender, quasi-névrosé, qui fait irruption avec son grand métier d’acteur improvisateur et une autre bouffée d’air frais. Voici deux textes qui ont inspiré ses nombreuses prestations ayant jonglé avec toutes sortes de directions :
Contrairement à la vengeance la paix n’est pas un mets qui se mange froid. Ni tiède non plus. Non, la paix, ça se mange à chaud et tous les jours. Ça beau être un aliment fin rare et recherché, ça ne coûte presque rien, c’est à la portée de toutes les bourses. Mais attention, la seule chose qu’on ne peut faire avec la paix, c’est d’imaginer qu’elle est faite pour bourrer les dindes. La paix, c’est pas une farce! Maintenant où est-ce qu’on trouve ce qu’il faut pour s’en réchauffer une petite batch? N’importe où! Faut pas être sorcier, juste un peu Gaulois, car la paix c’est une potion magique, ça rend invincible sans avoir besoin de tomber dans la maritime. Comme pour les repas de noces, il nous faut juste un peu d’amour et d’eau fraîche. Vous ajoutez deux cuillères à soupe de gros bons sens, une poignée d’attention aux autres, trois pintes de sang froid, une grosse poignée d’intelligence – vous pouvez y allez avec l’intelligence, plus il y en a aura, mieux ça sera, l’intelligence ça n’a jamais gâté la sauce – puis, mais ça c’est essentiel, beaucoup de patience et un kilo de tendresse brute. Vous laissez mijoter avec beaucoup d’humanité, vous agitez le bouillon de temps en temps pour diluer tous les grumeaux de discordes qui pourraient se former dans votre dos, puis laissez déglacer le tout aux feux doux, très doux le feu! Faudrait pas que votre paix colle au fond, alors tout doux le feu. Doux, doux, doux…Vous voyez, la paix c’est pas plus compliqué que ça à préparer, mais faut le vouloir et toujours se tenir autour de la casserole. Il est certain que si c’est votre première fois, vous ne la réussirez peut-être pas du premier coup, même au deuxième ou aux centièmes. Mais à la longue tout le monde peut y arriver. C’est très humain la paix et c’est loin d’être de la bouillie pour les chats. Et puis si vous vous découragez parce que vous ne réussissez pas votre paix tout de suite, même en essayant très fort et souvent, vous pourrez toujours faire votre part en sortant dehors joindre un groupe, et taper sur vos casseroles pour demander aux chefs cuisiniers des grands restaurants, comme c’est leur travail, de nous en préparer une grosse assiette et plus vite que ça! La paix, c’est un pain quotidien, un bon pain tout chaud, autrement dit, si vous en pétrissez quelques miches, la paix vous verrez, ça se vendra comme des petits pains chauds.
Oyez! Oyez! Tassez- vous, faites place, je n’ai pas que ça à faire. Non, madame, je ne suis PAS le lapin d’Alice au pays des merveilles. Pas un lapin pour La Paix. Le sol est instable, la planète est en feu, la pollution m’étouffe. Quelle heure est-il au juste? Trente ans? Trente ans d’artistes pour la paix? Oyez! Mais je suis en retard, moi! J’ai toutes sortes de manifs à faire, de banderoles à dérouler, de pétitions à signer! J’ai déjà signé la pétition contre le gaz de schiste, pour les bélugas, contre les centrales nucléaires, pour le registre des armes à feu, contre l’abattage excessif des arbres pour en faire du papier pour en faire des pétitions, mais je sais qu’il m’en reste une à signer, où est-elle? Où est-elle? Laissez passer! Je suis déjà en retard : le pont Maurice-Richard était bloqué par des manifestants!
DOM : Y ‘est pas r’posant, lui !
Judi: Il me ressemble ….!
SENSIBILITÉ ENVERS LA PLANÈTE
Judi: Cette année on a lancé le Concours Art et paix et on a reçu : des poèmes, des œuvres peintes, des vidéos, des chansons, des photos, une sculpture que vous avez vue en entrant, un logo, une calligraphie et un billet de loterie…
DOM: Qu’est qu’on gagne ?
Judi: La vie ! une vie d’être humain ! Oui, oui, je l’ai ici… : non mais y fallait y penser «Félicitations ! Un privilège inestimable ! Faites la danse de la victoire, une chance de gagner sur des milliards et des milliards ! Tirage au sort toutes les 7 secondes, 7 milliards de gagnants à date….» (un texte du militant pour la paix Pierre Viau).
DOM : Pour nos modestes 30 ans, nous en avons choisi 30. En art visuel, voici sur écran (voir http://artistespourlapaix.org/?p=6001 ) les œuvres retenues, accompagnées à la guitare par notre ami Jean-François Garneau : que dire de ces improvisations toutes en nuances exquises livrées par ce musicien versatile devant une foule respectueusement silencieuse ?
Judi: Si les Artistes Pour La Paix présentent ce spectacle ce soir, c’est beaucoup en pensant aux enfants et à la planète que nous leur laisserons. En réponse à la question, qu’est-ce que je peux faire pour la paix aujourd’hui, nos spectateurs ont répondu ? Aujourd’hui: Je vais sourire à toutes les personnes qui croisent mon chemin, je vais prendre au moins cinq minutes pour dialoguer avec l’être cher ou mes enfants,je vais faire l’effort d’être plus tolérant avec ceux qui ne pensent pas comme moi, je deviendrai membre d’Oxfam et d’Amnistie internationale,je vais collaborer avec quelqu’un plutôt que faire tout seul, aujourd’hui je me donne le défi de ne pas me chicaner,aujourd‘hui je vais offrir trois câlins.
Mesdames et Messieurs, Yolande Michaud, artiste pour la paix.
Extrait du livre de Philippe Claudel Le monde sans les enfants et autres histoires
Bonjour ! Mon nom c’est Wahid, et j’ai ton âge. J’habite une grande ville qui s’appelle Bagdad. Bagdad, c’est une très ancienne ville, qui existe depuis des milliers d’années. Son nom signifie « Celle qui fut donnée par Dieu ». Je ne sais pas si tu crois en Dieu, mais moi, je n’y crois plus beaucoup parce que lorsque je regarde ma vie et ma ville, je me dis que Dieu, soit il doit être endormi pour toujours, soit il doit être tellement vieux, tellement sourd et tellement aveugle qu’il ne se rend même plus compte de ce qui se passe chez les hommes qu’il a créés. Parce que tu sais, chez moi c’est la guerre. Oui oui la guerre.
La guerre comme dans les films, comme à la télévision, sauf que chez moi, à Bagdad, c’est en vrai, ce n’est pas un film. Il y a du bruit, de la fumée et des morts, et pas des morts qui se relèvent après avoir joué aux morts. Non, des vrais morts qui restent morts tout le temps et pour toujours.
Chaque matin je vais à l’école, enfin dans ce qui reste de mon école car les murs et le toit sont percés comme une passoire, je dois faire très attention, c’est ce que me dit ma mère. Je pense que la tienne te dit la même chose, c’est normal, les mères, elles sont toujours inquiètes pour leurs enfants.
Quand tu vois des militaires ou les autres, il faut faire attention à ne pas courir, car si tu cours, ils croient parfois que tu es un ennemi et ils te dirent dessus. C’est comme ça que mon copain Kamel, il a perdu sa jambe. Des soldats ont cru qu’il s’enfuyait après avoir fait quelque chose de mal, alors ils ont tiré. Kamel a été blessé à la jambe. Il a fallu la lui couper.
Moi je l’aime bien Kamel, on rigole bien, on est amis pour la vie. C’est embêtant sa jambe, parce qu’on ne peut plus jouer au foot et on ne pourra plus être champions du monde comme on se l’était promis. Mais bon ce n’est pas si grave que ça, maintenant, Kamel et moi on joue aux cartes. Plus tard, on sera champions du monde de cartes… Pense à moi comme je pense à toi, car c’est en pensant aux autres qu’on les fait exister et ça, les guerres n’y peuvent rien changer.
Wahid
France Bernard occupe ensuite la scène à son piano : Quand on fait de la peine
Quand on fait de la peine
À son meilleur ami
Quand on bafoue son frère
Qu’on est jaloux de lui
On ne sait plus quoi faire
On devrait fuir d’ici
Jusqu’au bout de la terre
Jusqu’au fond de la nuit
Chaque homme a sa misère
Qui partout le poursuit
Chaque homme a sa manière
De faire parler de lui
Chaque homme a sa lumière
De sagesse ou folie
Chaque homme est notre frère
Même s’il nous injurie
Un amour millénaire
Nous a donné la vie
Mais pourquoi cette guerre
Qui n’est jamais finie?
On ne vient pas sur terre pour se détruire ainsi
Le monde est un mystère
L’homme un mystère aussi
Là n’est pas mon affaire
On me l’a souvent dit
Parle-nous de rivière
De neige ou de la pluie
Parle-nous de ton père
Ou de l’astrologie
Mais laisse aux militaires
Les histoires de fusils
Judi: C’était, sur un texte du regretté Gilbert Langevin, celui qui a écrit « Celle qui va » et « La voix que j’ai » et qui avait pour principales munitions l’amour, l’amitié et l’insoumission, avec la voix cristalline qu’elle a, la pianiste et auteure-compositrice-interprète France Bernard qui nous a fait entrer en douceur tranquille dans cet univers riche et contrasté.
DOM : «Quand on fait de la peine», y’en a un qui s’est fait ben de la peine. Notre prochain invité est le fameux gratteux de guitare du Printemps Érable, attaqué par un matricule à l’automne 2012 et qui a su pardonner… c’est pour ça qu’il est notre Artiste pour la paix de l’année. Mesdames et messieurs, Serge Lavoie!
Serge Lavoie et Simon Pagé “C’est la fête”, viennent apporter une énergie joyeuse à la soirée en amenant le public à entonner avec eux une farandole débridée.
Œuvre en direct Dominique Normand (scène côté jardin)
Dans le Nord du Québec, le royaume animal est omniprésent et intimement lié à la Culture et à la Vie Autochtones. Pour un minimum de 3 mois par année, Dominique est en mode immersion au cœur des traditions Cries en participant aux activités quotidiennes telles que la fabrication d’outils, la préparation de plantes médicinales, le tannage des peaux et le travail du cuir, l’artisanat, la cuisine… La chasse, la pêche et la trappe sont de constantes pratiques et préoccupations de Dominique. Elle partage l’éveil spirituel et la quête de réconciliation. Elle stimule la jeunesse Crie par ses ateliers artistiques, elle peint et filme le quotidien de la communauté, les espaces et la vie sauvage du vaste territoire de la Baie James.
Dominique nous a dressé en quelques coups de pinceau virtuoses, en direct, une œuvre qui ira sûrement rejoindre sa série True collection of the North.
ENTRACTE
Domlebo entonne une chanson de circonstances : “Au son du clairon”
Gonflés par la parade et le sens du devoir toi et tes camarades
passez presque sans nous voir
Vous restez sur vos gardes pour ne pas nous décevoir
mais nos yeux vous regardent de peur de ne plus vous revoir
Et au son du clairon nos enfants défileront
régiments, bataillons cadets, filles et garçons
Viendra ce triste jour où c’est toi qui nous quitteras
sera venu ton tour d’aller te joindre aux combats
Comme roulements de tambours ta section se déploiera
prudence mon amour ta place est ici chez toi
Et au son du clairon nos enfants partiront
régiments, bataillons cadets, filles et garçons
Rev’nez-nous rev’nez-nous bien chacun d’vous
parmi les siens quand un soleil levant
annoncera l’heure du retour
certains les pieds devant
Yolande Michaud revient réciter ensuite de sa voix chaude et complice : “On pourrait tous, si on voulait”, un poème de Marie-Phé Caron.
On pourrait tous changer le monde
Si chacun de nous s’y mettait
Si l’on y croyait une seconde
On pourrait recréer la paix
Si l’on pouvait aimer la Terre
Sans penser qu’elle nous appartient
Elle sortirait de sa misère
Et renaîtrait entre nos mains
On pourrait tous s’armer d’amour
Pour crier plus fort que les guerres
Transformer ce qui nous entoure
En un chaud rayon de lumière
Si l’on pouvait faire le silence
Sur le mépris, les préjugés
On abolirait la souffrance
Par la seule force de nos pensées
On pourrait tous semer l’espoir
Et s’enrichir d’autres valeurs
Voir nos visages dans un miroir
Non déformé par la fureur
Si l’on voulait seulement grandir
Pour comprendre où est l’illusion
On pourrait mieux se définir
Et ne plus perdre la raison
On pourrait tous changer le monde
Si chacun de nous y croyait
Si l’on entrait tous dans la ronde
On pourrait recréer la paix
UN GRAND CRESCENDO D’AMOUR JUSQU’À LA FIN
Marc Hervieux, superbement accompagné par Claude Webster au piano, entonne alors Quand on n’a que l’amour de Jacques Brel. On se dit ça y est, la soirée vire scout (je l’ai déjà été, ce n’est pas un défaut!), et qui n’a pas grincé des dents en voyant tant d’interprètes se casser la gueule sur ce grand classique que le grand Jacques animait de la ferveur nécessaire pour en éviter tout aspect kétaine?
Mais on écarquille les yeux, on ouvre grand les oreilles, car il s’agit du second coup de cœur de la soirée qui déboulera sur une série de grands coups de cœur successifs, une immense interprétation qui semble grandir au fur et à mesure des mots qu’Hervieux prononcera, non pas avec le même art unique que les belges Brel ou Stromae, cela sonnerait trop précieux ou étrange à nos oreilles québécoises, mais avec un sens de la construction classique qui portera la fin de la chanson à un climax qui nous arrachera de nos sièges : du grand art !!!
Quand on n’a que l’amour
À s’offrir en partage
Au jour du grand voyage
Qu’est notre grand amour
Quand on a que l’amour
Mon amour toi et moi
Pour qu’éclate de joie
Chaque heure et chaque jour
Quand on a que l’amour
Pour vivre nos promesses
Sans nulle autre richesse
Que d’y croire toujours
Quand on a que l’amour
Pour meubler de merveilles
Et couvrir de soleil
La laideur des faubourg
Quand on a que l’amour
Pour unique raison
Pour unique chanson
Et unique secours
Quand on a que l’amour
Pour habiller matins
Pauvres et malandrins
De manteaux de velours
Quand on a que l’amour
À offrir en prière
Pour les maux de la terre
En simple troubadour
Quand on a que l’amour
À offrir à ceux-là
Dont l’unique combat
Est de chercher le jour
Quand on a que l’amour
Pour tracer un chemin
Et forcer le destin
À chaque carrefour
Quand on a que l’amour
Pour parler aux canons
Et rien qu’une chanson
Pour convaincre un tambour
Alors sans avoir rien
Que la force d’aimer
Nous aurons dans nos mains
Amis, le monde entier
Toujours un peu délinquants, les Artistes pour la Paix présentent ensuite coup sur coup deux numéros qui mettent en valeur la langue de Shakespeare, et ce à l’intérieur d’un festival coup de cœur francophone! Judi se présente d’abord humoristiquement comme une danseuse frustrée de n’avoir pas de prix pour son métier, ni d’Oscars, ni de Félix, ni de Gémeaux, ni d’Oliviers, pour s’effacer ensuite devant « notre prochaine invitée, qui a reçu des prix de partout sur la planète, elle a même reçu l’Ordre du Canada et en est devenue chevalière il y a deux mois, c’est quand même pas n’importe quoi ! » Il s’agit de Margie Gillis, qui était avec Raôul en 1983 à Hambourg en mission d’artiste pour la paix pour les Performing Artists for Nuclear Disarmament à danser devant cent mille personnes.
« Sur un poème militant de Padraig O’Tuama qui s’appelle Hunger Strikers qui raconte l’histoire de ces gens pauvres prêts à faire la grève de la faim pour défendre leurs convictions, voici une femme que j’estime énormément, et que j’ai l’honneur de pouvoir compter parmi mes amies: Margie Gillis! »
Cette dernière offre une performance éblouissante d’énergie, d’intensité, de force de caractère et de jeunesse!
Judi Richards, radieuse d’être encadrée par ses deux filles Karine et Sarah-Émilie Deschamps, entonne ensuite Bridge over Troubled Water. Le père de Paul Simon, professeur d’harmonie à l’Université de Yale, aurait immensément apprécié les audacieuses harmonies créées par ce trio de choc épaulé par le grand François Cousineau au piano et le contrebassiste Mathieu Tarlo.
La foule conquise crie son approbation. Quoi de mieux, en effet, comme symbole de la mission pacificatrice des Artistes pour la Paix, qui dénoncent autant les terroristes et anarchistes destructeurs que les gouvernements autoritaires aux priorités absurdes, que les mots de la chanson pont sur des eaux troublées? « Die Brücke », nous apprend l’exposition actuelle au Musée des Beaux-arts de Montréal, était un mouvement de passage entre impressionnisme et expressionnisme, un dernier moment de solidarité artistique germano-française avant que la grande guerre 14-18 n’éclate.
Ce chant constructeur annonce la venue au micro de la présidente, la cinéaste Guylaine Maroist, dont l’art du photographe Jean-François LeBlanc sait capter l’autorité tranquille.
Elle évoque notre regretté Frédéric Back ami des arbres et du fleuve avant de présenter quelqu’un d’autre qui sait de quoi il cause quand il parle d’amour et de paix, puisqu’il en a jasé avec rien de moins que les deux Beatles survivants et Yoko Ono, en travaillant sur le spectacle LOVE du Cirque du Soleil : Dominic Champagne!
Dominic n’épargne pas le public très attentif, en révélant l’immense supercherie montée par les milliardaires du pétrole pour nous entrer dans la gorge leurs réseaux de pipelines qui risquent de rendre nos terres inhabitables et nos eaux trop polluées pour nous désaltérer et tout cela pour un développement économique qui ne profitera en rien au Québec et dont l’ONU dénonce la désuétude criminelle, car responsable du réchauffement climatique. Il arrive lui-même d’Anticosti, de Ristigouche, de Cacouna, de Bécancour et partout, le même constat de populations locales bousculées par des prédateurs voraces. Il a la force de terminer par un vibrant appel à la mobilisation générale des artistes d’avant-garde que constituent les Artistes pour la Paix.
Voici que Judi annonce une surprise pour les spectateurs qui n’en espéraient pas tant : Michel Rivard, seul rescapé du Spectacle 1 des Artistes pour la Paix organisé par notre co-président d’honneur, Richard Séguin, vingt-trois ans et demi plus tôt au défunt Spectrum, comme peut le constater sa metteure en scène maintenant directrice de Rideau, la rayonnante Colette Brouillé qui est dans la salle du Lion d’Or. Et pour déboulonner sa statue Beau Dommage, – le scripteur du show, Pierre Huet, s’en charge lui-même très bien -, voici Michel agrippant sa nouvelle guitare, une splendeur, en prétextant une maladresse d’introduction trop longue; elle sert sa présentation humoristique d’une chanson qui ébranle naturellement toute prétention à se la jouer « artiste pour la paix au-dessus de la mêlée » (au-dessus de la mêlée, c’était le titre de l’appel de Romain Rolland en 1914 pour éviter la guerre, qu’il a dû publier en Suisse, exilé par la clameur belliciste). La chanson de Michel est un bijou d’autodérision que le secrétaire des APLP, Jean-François Garneau, lui a suggéré de présenter : Parlant de paix.
Sans doute antidote à l’émotion éprouvée à maintenant s’attaquer à ce qui devient au fil des années un hymne de paix incontournable, Michel éprouve également le besoin de s’adjoindre les services de nul autre que Marc Hervieux! On comprend leur trac puisque l’auteur d’Aimons-nous, Yvon Deschamps, est au premier rang! Mais ce trac fait place à une interprétation sublime qui les porte tous deux au sommet.
La soirée est encore jeune : en exemple d’une intervention politique récente des Artistes pour la Paix, Pierre Jasmin, vice-président et longtemps président du mouvement, cite celle du 2 octobre dernier, date marquant l’anniversaire de naissance du Mahatma Gandhi, choisie par l’Organisation des Nations-Unies pour célébrer la Journée internationale de la non-violence. Nous avons ce jour-là envoyé aux cinq partis à Ottawa une pétition à laquelle la première à réagir fut Élizabeth May, chef du Parti Vert, qui l’a approuvée dès le lendemain avec enthousiasme. Mais c’est Hélène Laverdière, APLP, députée de Montréal Ste-Marie et co-porte-parole pour les Affaires étrangères du NPD, qui l’a lue en entier en Chambre des Communes le 6 octobre, en introduction à son propre discours qui tentait d’enrayer le vote majoritaire conservateur.
Le public applaudit Hélène présente dans la salle que Pierre fait lever en ajoutant : le journaliste noir injustement emprisonné en Pennsylvanie depuis trente-trois ans MUMIA ABU-JAMAL dit fort justement, et notre amie syrienne Mère Agnès-Mariam-de-la-Croix l’approuverait : « Vous ne pouvez pas bombarder les peuples en prétendant leur apporter la paix. Les bombes n’apportent que mort et souffrance ».
Rappel de la pétition : « Nous, citoyens, demandons aux élus d’écouter notre voix collective qui dénonce haut et fort le recours à la guerre. Nous croyons que les bombardements envisagés par le Premier Ministre contre les terroristes de l’État islamiste, en absurde alliance avec des pays qui ont nourri leur fanatisme, ne pourront que nuire à notre sécurité, à la sécurité mondiale. La guerre n’apporte JAMAIS de solution satisfaisante et durable. Depuis 2003, les morts afghanes, irakiennes, libyennes et syriennes en ont fait la preuve un demi-million de fois. Nous croyons que la violence engendre la violence. Nous voulons un pays pacifique, qui s’offre en exemple à l’Organisation des Nations unies. Nous demandons, par conséquent, aux députés de la Chambre des Communes de s’opposer à toute entreprise guerrière du Canada. »
Judi : « Juste avant de vous présenter notre dernier artiste invité, j’aimerais remercier la Caisse du Quartier latin et la Caisse Pop de la Maison Radio-Canada qui croient en nous et nous ont donné un coup de main. Merci ! Ils sont avec nous ce soir, Solédan Hébert et François Ariel ! Merci au Coup de cœur Francophone pour son accueil.
DOM: Et maintenant ?
Judi & DOM: DANIEL LAVOIE !!!
Daniel Lavoie entonne une chanson datant de 1984, tout comme boule qui roule, pour lesquelles les Artistes pour la Paix, alors présidés par notre co-présidente d’honneur Antonine Maillet (qui venant du Nouveau-Brunswick était sensible à ce timide gars du Manitoba), l’avaient choisi en 1988 comme tout premier « artiste pour la paix de l’année », une tradition qui perdure jusqu’à nos jours: l’immortelle «Ils s’aiment» avec Marc Hervieux et non, il ne s’agit pas d’un coming out!
Ils s’aiment comme avant
Avant les menaces et les grands tourments
Ils s’aiment tout hésitants
Découvrant l’amour et découvrant le temps
Y’a quelqu’un qui se moque
J’entends quelqu’un qui se moque
Se moque de moi, se moque de qui
Ils s’aiment comme des enfants
Amour plein d’espoir impatient
Et malgré les regards
Remplis de désespoir
Malgré les statistiques
Ils s’aiment comme des enfants
Enfants de la bombe
Des catastrophes
De la menace qui gronde
Enfants du cynisme
Armés jusqu’aux dents
Ils s’aiment comme des enfants
Comme avant les menaces et les grands tourments
Et si tout doit sauter
S’écrouler sous nos pieds
Laissons-les, laissons-les, laissons-les,
Laissons-les s’aimer
Daniel Lavoie est rejoint par Catherine Major pour chanter “Qui sait” et leurs voix et leurs arts de la scansion rythmique et de l’intensité pianistique se rejoignent en une complicité artistique qui nous donne la chair de poule.
Leur finale sera amplifiée par la présence ardente de Judi et Karine.
Car c’était évidemment une finale, comment aller plus haut ? Eh bien non, on avait tout faux, revoici Daniel Lavoie, Marc Hervieux et tous ensemble avec la foule qui n’en peut plus dans “Boule qui roule”, notre pauvre planète spoliée et bousculée…
Oui et tout ça, ça se passe
Quelque part dans l’espace,
Sur une boule qui roule dans l’infini.
C’était un coup de cœur pour la paix, pour lequel nous devons remercier la merveilleuse Diane Croteau, sa fille et sa petite-fille qui ont veillé en sous-sol à ce que nos musiciens invités ne manquent ni de vivres ni de boire et qui s’est occupée de la logistique compliquée des finances.
Merci à tous les bénévoles sur place pour nous donner un coup de main ainsi que Lise, Coco, Sylvie et Louise à la régie arrière scène. «On remercie Sylvie Dugré et sa fille qui ont assisté Judi dans la direction de production, ainsi que Julien Levac Joubert, aux communications»
Et on attend de pouvoir revivre des moments forts de cette soirée grâce au cinéaste Martin Duckworth, assisté du preneur de son Glen Hodgins.
Toutes les photos de cet article sont l’oeuvre de Jean-F. LeBlanc / Coup de coeur francophone. Voyez le reportage photographique complet de la soirée en cliquant ici.
PS Personnellement, j’aurais titré cet article amours clandestines car il me semble que la qualité de cette soirée du 30e anniversaire des Artistes pour la Paix aurait dû intéresser un réseau et primer sur pas mal d’émissions commerciales nulles. Alors pourquoi non? N’est-ce pas dans la foulée de deux documents distribués sur les tables de la soirée du 10?
1- notre lettre saluant la décision de la Suède de reconnaître la Palestine, non publiée, adressée au ministre des Affaires étrangères (il n’y a pas encore répondu) cliquer ici
et 2- nos révélations à propos de compagnies canadiennes qui investissent dans les bombes nucléaires, les F-35 et les drones?
Le rapport www.dontbankonthebomb.com vient d’être publié le 7 novembre 2014 à Berlin. Susi Snyder (PAX) co-auteure du rapport (traduction P. Jasmin):
Ce rapport donne à chaque personne qui possède un compte en banque une manière facile de lutter contre les bombes nucléaires. Vous n’avez pas besoin de connaître grand-chose en physique nucléaire ni en relations internationales ni en finances pour décider “ces bombes sont inacceptables et je ne veux pas payer pour elles!” Comment? Personne ne peut tout faire mais toute personne peut faire quelque chose, par exemple en utilisant l’outil suivant http://goodbyenuk.es/take-action/
Voici des compagnies canadiennes à boycotter, dans l’ordre d’indécence:
1- Financière Sun Life a investi depuis 2011 plus de six milliards de $ américains de notre argent, surtout dans Lockheed Martin & Northrop Grumman, 2 compagnies américaines qui produisent aussi les F-35 furtifs et agressifs dont M. Harper veut acquérir quatre spécimens à fort prix et les drones armés dénoncés par Malala Yousafsai, prix Nobel de la Paix 2014 choisie personnalité internationale 2013 par vos APLP. Dire que notre élite politico-financière adopte un programme d’austérité coupant dans la santé, l’éducation et les garderies et veut nommer Isabelle Hudon femme d’affaires de l’année…
2- Scotia Bank avec plus d’un milliard et demi (Northrop, Raytheon, General Dynamics).
3- Power Financial Corp avec un milliard et demi (Northrop Grumman, Gen Dynam).
4- Toronto-Dominion avecun milliard (General Dynamics, Honeywell, Northrop).
D’autres contre qui vos protestations pourraient vite s’avérer efficaces : BMO et autres qui nous surprennent : La Caisse de dépôt et placement du Québec qui donne 455 millions de $ à Lockheed Martin, Manulife Financial (138 millions de $ à Northrop Grumman), Ontario teachers’ pension Plan (91 millions de $ à Textron). Quant à la Banque Royale du Canada, ICAN la félicite pour son intention d’établir un règlement interne empêchant tout investissement dans les bombes nucléaires; mais elle ne s’est pas encore débarrassée de ses investissements de + d’un milliard de $… Pourquoi ne pas plutôt investir dans les Caisses populaires Desjardins?
PJ
Quel beau texte Pierre tu écris-là pour nous partager le merveilleux de cette soirée immense !
Cette soirée s’est passée « quelque part dans l’espace sur une planète qui roule dans l’infini » ou des chansons pacifistes nous rappelaient que le meilleur remède contre le militarisme est l’amour de l’humanité et la sagesse de savoir que nous sommes tous et toutes, hommes, femmes, enfants, personnes âgées, des habitant-e-s d’une Terre à la fois forte de ses pierres et fragile de ses atmosphères mutilées par le monoxyde de carbone.
Ça valait le coup de célébrer ce 30ième anniversaire!! Et des anniversaires il y en aura d’autres j’en suis convaincue. Car la militarisation du Canada est une source d’inquiétude et de refus pour beaucoup de citoyens et de citoyennes. Bientôt nous aurons besoin de comités régionaux pour appuyer les APLP,le Collectif Échec à la guerre et l’Alliance canadienne pour la paix et entamer une lutte qui, espérons-le, persuadera le gouvernement fédéral de changer de politique étrangère. Cela afin que nous revenions à la belle époque où le Canada déployait ses troupes pour calmer le jeu, surveiller, aider, au nom des Nations Unies.
Longue vie aux Artistes pour la paix !!!
Pascale Camirand
Si vous avez lu la lettre au ministre des Affaires intérieures ci-dessus, vous comprendrez pourquoi j’ajoute ceci.
Les Artistes pour la Paix déplorent l’attaque sanglante survenue aujourd’hui dans un lieu de prière juif à Jérusalem, ce qui en aggrave hélas la portée symbolique. Nous exprimons nos condoléances au peuple juif d’Israël, à défaut de pouvoir trouver une oreille attentive chez le gouvernement de Benyamin Nétanyahou; car ce dernier semble aveuglé par le réflexe biblique du « œil pour œil, dent pour dent », au lieu d’évoluer vers une attitude plus adaptée au XXIe siècle et surtout de devenir conscient qu’il représente les composantes palestinienne et juive qui coexistent en Israël.
Les Artistes pour la Paix croient qu’il faut que la paix devienne un objectif auquel les médias et nos gouvernements s’attellent sans relâche et en priorité.
À la suite des deux agressions armées contre des militaires canadiens il y a un mois, nous avions écrit (http://artistespourlapaix.org/?p=6224) « Les Artistes pour la Paix se déclarent horrifiés que des forcenés, mus semble-t-il par une pulsion de mort associée au fanatisme islamiste, aient trouvé la mort qu’ils recherchaient, non sans avoir hélas causé deux victimes militaires canadiennes en trois jours.» Sommes-nous surpris de la nouvelle attaque sanglante perpétrée aujourd’hui à Jérusalem par deux terroristes palestiniens, avant d’être abattus, sans doute mus par le même fantasme illusoire du djihad et des mille vierges promises?
Il y a moins de deux semaines, nous écrivions à l’Honorable John Baird, ministre des Affaires étrangères du Canada : «Nul doute que la reconnaissance [par la Suède de la nation palestinienne] apporte un baume à la situation de frustration extrême vécue actuellement par les Palestiniens face à l’agressive politique de colonisation israélienne en leur territoire, en particulier à Jérusalem, agression que notre pays devrait condamner. Nous croyons qu’après le défunt processus de paix d’Oslo il y a vingt ans, l’initiative de la Suède représente une nouvelle clé à saisir pour empêcher une détérioration de la situation des Palestiniens. Or, toute situation désespérée entraîne, hélas, la possibilité d’actes terroristes. C’est pourquoi nous jugeons que la Suède vient d’accomplir un acte de paix, auquel le Canada doit songer à apporter son appui. »
Hélas, ces mots n’ont trouvé aucune réponse ni de notre gouvernement, ni des médias, avant qu’ils se transforment en prophétie des déplorables événements tragiques d’aujourd’hui.
Splendide reportage, belles images.
Le message finira bien par passer.
YNot