Caroline Monnet artiste multidisciplinaire anishinaabe/française née en Outaouais/Québec 

 

 

 

 

Après avoir étudié la sociologie et la communication à l’Université d’Ottawa et à l’Université de Grenade, en Espagne, l’artiste multidisciplinaire anishinabee et française Caroline Monnet entreprend sa carrière dans les arts visuels en présentant notamment ses créations au Whitney Biennal de New York, à la Biennale d’art de Toronto, au musée KØS de Copenhague, au Musée d’art contemporain de Montréal et au Musée des beaux-arts du Canada. Ses expositions individuelles incluent le Musée des beaux-arts de Montréal, le Musée Schirn de Francfort et l’Arsenal art contemporain à New York et ses œuvres se retrouvent dans plusieurs collections permanentes en Amérique du Nord et à la maison de l’UNESCO, à Paris. 

Caroline Monnet a aussi participé au Festival international du film de Toronto (TIFF), au Sundance Festival, au festival international de Sydney, au Festival international du film de Palm Springs et à la Berlinale. Dès 2016, la Cinéfondation du Festival de Cannes la sélectionnait pour une résidence à Paris. Elle a reçu le prix Pierre-Ayot, la bourse Merata Mita du Festival Sundance et est Compagne des Arts et des Lettres du Québec. Elle est représentée par la galerie Blouin-Division à Montréal. 

Elle utilise les arts visuels et médiatiques pour communiquer des idées complexes sur l’identité autochtone en examinant des récits culturels. Son travail s’attaque à l’impact du colonialisme, en actualisant des systèmes dépassés avec des méthodologies anishinaabeg. Elle est connue pour son travail minimaliste, bien que chargé d’émotions, qui utilise des matériaux industriels et combine les vocabulaires des cultures visuelles populaire et traditionnelle aux tropes de l’abstraction moderniste afin de créer des formes hybrides singulières. Monnet est toujours en phase d’expérimentation et d’invention, dans sa vie comme dans son œuvre. 

C’est son film Bootlegger qui a attiré en premier l’attention émerveillée des Artistes pour la Paix. Ce premier long métrage de la réalisatrice mettait en vedette Pascale Bussières APLP2020, Devery Jacobs, Samian APLP2016, Jacques Newashish, Dominique Pétin, Joséphine Bacon et C.S. Gilbert Crazy Horse dans les principaux rôles. Elle écrit si justement : 

« Le changement passe souvent par les femmes. Elles sont aux barricades, au premier plan des mouvements sociaux, aussi porteuses de mémoire. »  

Quoi de plus vrai, à observer les femmes de son film secouant les vieilles lois patriarcales, refusant même les faveurs paternalistes.  

Ce qui frappe dans les films des trois gagnantes conjointes du prix ARTISTES POUR LA PAIX aujourd’hui, c’est l’intense préparation réfléchie sur des années de leurs films, qui néanmoins conservent l’élan vital de leur nécessité créatrice. Personne ne prévoyait que Caroline devrait attendre quatre ans pour faire fructifier son Prix du meilleur scénario – Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) et la Cinéfondation, obtenu au Festival de Cannes 2017! 

Quand tant d’éléments concourent à forger une œuvre majeure, inclinons-nous bien bas devant une immense réussite. Bootlegger marque une étape d’un cinéma autochtone arrivé à maturité pour s’intégrer pleinement à l’art-vérité. Il peut donc échapper ainsi au documentaire qui l’a fait émerger avec le grand Arthur Lamothe et divers cinéastes inuks et ce cinéma n’a plus besoin de s’ériger en propagande de vertu, posant plutôt les vraies questions essentielles de l’art. C’est ce qu’a compris le 50e Festival du Nouveau Cinéma en en faisant son film d’ouverture à Montréal 2021. 

À une question qui préoccupe les Artistes pour la Paix, à savoir la survie de l’art quand toute la société concourt à le submerger dans le mercantilisme, ce film répond admirablement et nous en remercions la productrice Catherine Chagnon à la tête de la dynamique boîte Microclimat films. Le sujet : une jeunesse animée de questions vitales, au-delà des pièges de l’alcool (ou de la drogue, incluant la cigarette) où semble s’engluer la communauté autochtone de la Première Nation Kitigan Zibi Anishinabeg, actrice principale du film. Soulignons : 

  1. La bande sonore exceptionnelle de Jean Martin qui exploite aux moments de  tension la musique haletante de Tanya Tagak (dont s’inspire Élisapie Isaac). Bravo à la science de Bernard Gariepy Strobl qui intègre subtilement le traitement sonore à la trame narrative tournée en trois langues, français, anglais et anishinaabemowin (algonquin). Quel choix audacieux, totalement récompensé par un parfum prononcé d’authenticité. 
  2. La narration, par la réalisatrice Caroline Monnet et Daniel Watchorn qui ont eu pour conseillers les maîtres en scénarisation québécois Danielle Dansereau et Robert Morin qui ont sûrement contribué à préserver les ellipses magiques permettant les changements de perspective et revirements inattendus, propices au suspense. 
  3. La direction de la photographie par Nicolas Cannicioni fascine, dans un  paysage pourtant monopolisé par une forêt monotone, car il y débusque la fougue des rivières dans un patchwork d’alternances brillamment articulé par la monteuse d’expérience Aube Foglia. 
  4. En maîtrise de leur art, divers acteurs autochtones comme Jacques  Newashish et surtout la jeune et pure étudiante revenue dans sa communauté, Devery Jacobs, se confrontent à Dominique Pétin, dans le rôle de cheffe du conseil de bande. Deux mentions à Joséphine Bacon dont la discrète présence éclate, ainsi qu’à Samian, dans un rôle de policier voulant améliorer la société, qui se trouve en face d’une réalité trop complexe à saisir. 

Enfin, il y a des années, Caroline Monnet créait à Montréal une installation dénonçant le manque d’accès à l’eau potable des communautés autochtones, ce que les APLP dénoncent par lettres aux gouvernements depuis des années, en adressant leurs reproches en particulier à M. Trudeau pour l’hypocrisie de ses bonnes intentions jamais réalisées, alors qu’il dépense plus d’une vingtaine de milliards de $ annuels pour des mécaniques de guerre destructrices. 

NB Sa sœur Émilie Monnet a écrit Marguerite: le feu, a mis en scène le spectacle Uvattini d’Elisapie et créé/ présenté le spectacle Nigamon Tunai au Festival TransAmériques à l’Espace Go, en Écosse, à Lisbonne et à Madrid. P.J.  

Merci sincèrement pour ce bel hommage, je suis touchée d’être sélectionnée comme Artiste pour la Paix de l’Année. Il y a tant à faire pour une société plus juste, inclusive et équitable. Meilleures salutations, Caroline 

 

Caroline Monnet remercie les APLP avec l’écoute attentive de Sonya Ben Yahmed