J’ai soutenu que la guerre était un produit de l’inconscient, un refoulement qui a mal tourné, et encore plus précisément, une perversion. J’utilise un vocabulaire philosophique précis.

J’ai défini la conscience comme l’organe de l’intuition, de la perception de soi, de l’intelligence des finalités, du jugement éthique et esthétique (si souvent en contradiction avec la morale apprise). Si telle est la conscience, l’inconscience est son en deçà, c’est-à-dire le lieu des conditionnements sociaux, des interdits et des prescriptions inculquées, des automatismes, donc du « surmoi », mais aussi le lieu du refoulement, le lieu de ce que l’on ne veut pas voir.

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Dans cette perspective, il y a une certaine sédimentation de l’esprit qui, en nous, va de la biologie aux conditionnements sociaux, des conditionnements à l’intelligence réflexive, de l’intelligence réflexive à la conscience. Traditionnellement, on a défini la perversion, comme le retournement d’une strate au-dessus vers une strate en dessous; le plus souvent, il s’agit de sacrifier la conscience, afin d’utiliser l’intelligence des moyens pour assouvir une vengeance, une humiliation ou une haine refoulée. Un détournement de la finalité de l’intelligence. À ce titre, l’agression d’une dictature pour briser une démocratie est évidemment une perversion dont les conséquences sont graves pour toute l’humanité.

Encore là il y a souvent confusion, on peut croire qu’une démocratie peut très bien diriger un empire pouvant lutter contre un autre empire, mais alors ce n’est plus une démocratie, mais une perversion de la démocratie. La démocratie, il ne faut pas l’oublier, est non seulement le mouvement de la conscience vers la participation de tous aux responsabilités et aux décisions communes, mais c’est aussi et surtout la justice sociale : l’éducation de tous à l’exercice responsable de la liberté, l’ensemble des conditions de vie accessibles à tous (air respirable, eau potable, nourriture, logement, soin de santé),une justice indépendante des revenus et des partis politiques, une égalité politique, économique, sociale, indépendante des sexes, de la race, de la religion, etc. Il n’y a pas encore d’État qui soit démocratique, mais certains États se sont avancés vers la démocratie, poussés par des mouvements sociaux persistants et éclairés.

La lutte pour la démocratie et contre la dictature nous concerne tous. S’il y a actuellement un ennemi bien plus dangereux que Poutine, c’est bien l’impossibilité d’informer une partie de plus en plus importante de la population parce qu’elle est prisonnière d’un silo de mensonges minutieusement construits pour la manipuler et la radicaliser. Une telle population captive permet d’atteindre ou de se maintenir au pouvoir. Ce phénomène est actuellement mondial et dépasse de beaucoup les États-Unis trumpistes, la Chine et la Russie.