Dans une négociation de guerre, celui qui l’emporte force la négociation de l’autre, et ce qu’il a emporté par violence, il le garde. C’est un peu comme un vol à main armée : j’ai pris ta maison, donc j’ai prouvé que je pouvais prendre le reste, alors négocions maintenant ton garage. Si la guerre est telle que l’attaquant n’emporte rien et que l’attaqué n’a pas envahi l’attaquant, la négociation peut donner un traité de paix jusqu’à ce que l’un se sente plus fort que l’autre. Si une force bien supérieure à l’attaquant peut intimider l’attaquant, cette force peut forcer une négociation comme cela est arrivé après la Guerre de six jours entre Israël et l’Égypte. On le voit, la loi de la force est au-dessus de la justice tant qu’il n’y a pas de force de justice supérieure aux forces des belligérants. À l’intérieur d’une nation, la police, l’armée, le ministère de la Justice peuvent faire régner la paix par la force s’ils disposent d’une force suffisante, sinon, c’est la violence horizontale ou ls guerre civile.
Bref, dans l’histoire d’une humanité qui tente de civiliser sa violence, nous n’avons pas encore atteint le stade d’un « État de droit international » fondé sur la justice et non sur la force. La force prime toujours. Par « État de droit international », il faut entendre un état de l’intelligence et de la conscience collectives qui serait fondé sur un principe autre que « la force des armes contraignant l’obéissance ». Y a-t-il quelque chose dans l’être humain qui lui permet de refuser de se soumettre à une puissance de mort, de terreur et de torture? Est-ce seulement possible d’y arriver? Comment le droit (la conscience de la justice) pourrait-il s’imposer sur la force sans jamais utiliser les armes ni menacer de les utiliser?
C’est là où Gandhi a changé la donne. Il a rassemblé assez de conscience collective autour de son « autorité morale » pour que la volonté de justice impose à la Grande-Bretagne de libérer les Indes. Son « arme »: la résistance pacifique, la menace d’une désobéissance civile coordonnée à très grande échelle. Évidemment, globalement l’humanité n’en était pas là, la force a repris immédiatement le contrôle, mais, pour un moment, les consciences ont entrevu ce que pourrait être le principe d’une paix mondiale. Les cyniques diront que c’est encore une force au même titre que les armes. S’ils ont raison, alors, il n’y a plus d’espoir pour l’être humain, car la force brute nous détruira tôt ou tard, soit directement soit à travers une crise de l’environnement qui nous emportera.
L’humanité est l’espoir que l’intelligence consciente finisse par transcender l’assujettissement aveugle à la peur qu’imposent les armes. Et la voie de Gandhi est la seule possible. C’est pourquoi l’espoir, et le seul espoir est d’éveiller une société civile transcendante au nationalisme, aux religions, aux races, au patriarcat qui soit capable d’une désobéissance à grande échelle et donc capable de sacrifier tout privilège indu pour élever la justice au-dessus de la force.
Un pacifiste est celui qui place la justice au-dessus de la force en y sacrifiant tous ses privilèges afin de gagner l’autorité morale nécessaire pour rassembler ne serait-ce que quelques personnes éclairées par l’amour de la justice, « l’amour de l’autre comme soi-même ». Une élévation au-dessus de la peur. Il faut donc avoir fait l’expérience que l’amour apporte un état de plénitude dans la conscience qui transcende la peur.
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