Bravo au gouvernement du Parti Québécois pour avoir fermé la porte à toute discussion laissant croire à une éventuelle réouverture de la mine Jeffrey: leur PDG Bernard Coulombe est revenu bredouille de Québec, aujourd’hui 10 octobre. L’exploitation de la mine Jeffrey, à laquelle le gouvernement Charest a accordé un vendredi en fin d’après-midi de juin, en cachette, 58 millions de $ de nos taxes, aurait affecté pendant des décennies la santé de centaines de milliers de personnes à travers le monde, notamment en Asie, principal lieu d’exportation de l’amiante québécoise. Le nouveau gouvernement pourra sans doute compter sur l’appui de la Coalition Avenir Québec qui s’était opposée à cette honteuse mesure électoraliste du gouvernement Charest.
Des statistiques effarantes
Peu de gens savent à quel point cette mesure était en outre criminelle. L’Organisation mondiale de la santé estime que plus de 107 000 personnes par année meurent de maladies liées à l’amiante. L’étude souligne que de 1999 à 2008, 70 pour cent des morts causées par des maladies liées au travail au Québec ont été causées par l’amiante, et que cette dernière demeure la cause principale de ces maladies dans l’ensemble du Canada. Même la Banque mondiale, peu suspecte d’écologisme, recommande d’éviter l’amiante dans la construction ou dans la rénovation, principaux usages de l’amiante venant du Québec, alors que la Confédération syndicale internationale, qui représente 160 millions de travailleurs de 155 pays, demande son interdiction pure et simple. L’amiante, de plus en plus utilisée en Chine, en Inde et dans divers pays en développement, comprend divers types de minerais fibreux utilisés dans les matériaux de construction destinés entre autres aux toitures, aux planchers et à l’isolation. 50 pays (liste qui ne cesse de s’allonger) l’ont bannie, d’autres nations industrialisées ont pratiquement cessé de l’utiliser et le Canada, la Russie, le Kazakhstan, le Brésil et la Chine produisent ensemble plus de 90 pour cent de sa production.
Problèmes graves de santé
Un examen de preuves épidémiologiques a conclu que toute forme d’amiante est dangereuse et peut causer le cancer du poumon, des ovaires et du larynx, de même que l’amiantose, la mésothéliome et d’autres maladies pulmonaires. Les graves problèmes de santé associés à l’amiante (ou à son hypocrite appellation de chrysotile) ont suscité une levée de boucliers unanime par les experts de santé du monde entier: Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), Association Médicale du Canada, Association Canadienne des Médecins pour l’Environnement, Société canadienne du cancer, Organisation Mondiale de la Santé, etc. Le docteur Réjean Hébert, nouveau ministre de la Santé, avait dénoncé les projets d’ouverture de la mine Jeffrey voisine de son comté pendant la campagne électorale et son courage a failli lui coûter son élection qui ne fut assurée que par 78 votes de majorité, comme on l’avait écrit dans notre article « post 4 septembre » sur notre site www.artistespourlapaix.org .
Étude trafiquée à l’Université McGill
Cette unanimité de chercheurs dénonciateurs de l’amiante était néanmoins démentie par une étude « indépendante » de l’Université McGill qui entretenait le mythe d’utilisation sécuritaire du chrysotile. « C’est de la pure invention. Ces chercheurs étaient en fait à la solde de l’industrie » a déclaré cette année M. Soskolne, ancien président de la Société canadienne d’épidémiologie et de biostatistique, qui a révélé que cette étude avait été financée par l’Association minière d’amiante du Québec (QAMA) et avait été effectuée «selon des techniques douteuses de sélection, d’échantillonnage et d’analyse». «Le Canada a grandement contribué à semer l’ambiguïté et à nuire à l’avancement de la science ainsi qu’à la recherche de la vérité concernant l’usage de différents types d’amiante», a-t-il conclu, en accusant les producteurs d’amiante d’adopter les mêmes tactiques que l’industrie du tabac pour promouvoir leur produit, y compris la manipulation de la recherche.
Hypocrisie canadienne
Lors d’un sommet international tenu à Genève l’an dernier, la délégation canadienne s’était opposée à l’inclusion de l’amiante dans la liste des substances dangereuses de la Convention de Rotterdam, un traité onusien datant de 2004 qui ne pouvait entrer en vigueur que par consensus unanime. Le Canada de M. Harper récolta donc le douteux honneur d’être le pays bloquant ce consensus. Ce n’est qu’après l’arrivée au pouvoir du gouvernement de madame Marois que le gouvernement fédéral, par la bouche du ministre Christian Paradis, a annoncé que le Canada ne s’y opposerait plus, tout en faisant un discours nauséabond sur la responsabilité du gouvernement québécois dans cette décision qui allait coûter des jobs à ses commettants. Rappelons que M. Paradis, rare député élu au Québec (Mégantic-L’Érable) parmi les Conservateurs qui n’y ont obtenu que 15 % du vote, est ministre de l’Industrie, après avoir été en 2004-5 président de la Chambre de Commerce d’Asbestos. On sait que des accusations de fraude électorale pèsent encore sur lui, étudiées par la Cour Suprême.
Radio-Canada Estrie fait de la propagande honteuse
Le 10 octobre, l’animateur Réjean Blais de Radio-Canada/Estrie a réussi à rejoindre M. Bernard Coulombe dans sa voiture de retour de Québec où sa rencontre avec des sous-ministres lui avait confirmé le refus de Québec d’appuyer ses projets d’affaires de développement de l’amiante. L’entrevue fut des plus complaisantes : tout y est passé, les pauvres travailleurs perdant leur job, le désespoir de l’entrepreneur qui avait tant fait pour sa communauté également laissée pour compte, le méchant gouvernement qui ne voulait même pas discuter… Radio-Canada a-t-elle essayé de retrouver en Indochine (où bien des travailleurs parlent français, par survivance d’un passé colonial) une seule des milliers de familles en deuil à cause de l’amiante québécoise? Ou alors Radio-Canada préparerait d’autres entrevues avec de pauvres cultivateurs de tabac malmenés par la loi interdisant la publicité de leurs produits et avec des pornographes malheureux des contraintes de la loi de protection des mineures ?!?
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Pierre Jasmin, vice-président APLP
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