GillesVigneault

Hier soir, 10 juin, le grand Gilles Vigneault, un des co-fondateurs des Artistes pour la Paix, remplissait le Vieux Clocher de Magog et y obtenait des ovations debout, avec l’extraordinaire pianiste Philippe Noirault et la présence sur scène de Françoise Guérette [1].

L’ayant vu il y a quatre ans dans cette formule de dialogues et de chansons, nous l’avons revu, ma femme (sa sœur et notre beau-frère) et moi, plus en forme vocalement, scéniquement et maître de cette formule qui débutait en 2013 encore un peu laborieusement.

Des recherches approfondies font de plus en plus l’exégèse de Vigneault mais hier lui-même nous a aidés à mieux comprendre les références de sa chanson « les cerfs-volants ». L’auteur d’une grande chanson sur l’uranium de Natashquan (voir http://www.artistespourlapaix.org/?p=7114 ) nous a expliqué le concept du « jour sans ombre » comme originant de l’éclat intense et meurtrier de la déflagration nucléaire. Je n’avais pas besoin qu’on m’ouvre plus grande porte à une interprétation inédite des « cerveaux-lents », ou c-l, ou conservateurs-libéraux.

Le Devoir fait sa première page de samedi sur la liberté de la presse anéantie en Turquie, alors que nous l’alertons en vain depuis septembre où les APLP avaient manifesté devant les bureaux de Trudeau contre cette horreur. Soyons beaux joueurs : félicitons le journal qui a délégué sa journaliste Lisa-Marie Gervais en Turquie.

Mais que RIEN NE SOIT ÉCRIT de négatif sur les 500 milliards de $ promis mercredi dernier à la militarisation ? Nous revoilà au Québec comme en Turquie l’an dernier où il était interdit de critiquer les militaires (encore que nous ne critiquons pas les militaires mais le ministre de la Défense, l’industrie militaire et ses joujoux très coûteux)…

Et qu’en plus jeudi, de 10h le matin à 18 heures, la Chambre des Communes ait été animée d’un débat passionnant sur la nécessité pour le Canada de prendre part à l’ONU avec 130 pays au débat voulant éliminer l’arme atomique, un débat auquel ont pris part une trentaine de députés, sans que PAS UNE SEULE LIGNE DU DEVOIR OU DE LA PRESSE et pas une image de Radio-Canada n’y ait fait ne serait-ce qu’une furtive allusion, nous voici en pleine CENSURE !

Résumons ce débat auquel Conservateurs et Libéraux ont apporté une mauvaise foi évidente à affirmer que le Canada faisait bien de s’aligner sur les neuf puissances nucléaires et surtout sur Donald Trump dont les Conservateurs ont repris les plus ignares positions sur la Corée du Nord.

Rejoints par la brillante Elizabeth May qui, présente à la Conférence de l’ONU portant sur la dégradation des océans (envahis par nos plastiques), a été interrogée par des délégués de plusieurs pays ne comprenant pas le boycott par Trudeau des pourparlers en vue d’éliminer la bombe nucléaire à l’ONU, le NPD avait très bien préparé la joute oratoire de jeudi, et c’est sans doute pourquoi les médias officiels l’ont entièrement boycottée, parce qu’il n’y avait pas moyen de la tourner à l’avantage de la mafia nucléaire.

Hélène Laverdière a été la première sur le sujet, ayant posé la question-qui-tue à sept reprises à Chrystia Freeland lors des derniers mois en Chambre des communes sans jamais obtenir de réponse. Elle est revenue à la charge jeudi le 8 juin, en l’absence de la ministre et de Justin Trudeau parti faire des selfies en Charlevoix, jubilant à l’idée de recevoir l’an prochain ses complices du G7. Qui sont-ils? Les cinq « grands » du Conseil de Sécurité n’ayant gagné leur place que parce qu’ils possèdent des bombes nucléaires, trois d’entre eux font partie du G7, les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne. Le Canada, le Japon, l’Italie et l’Allemagne sont les quatre autres pays dominants membres.

Les Conservateurs n’ont pas encore compris que la bombe nucléaire, même entre les mains de pays « amis » (l’OTAN considère la Turquie d’Erdogan comme tel!!!) est une arme dangereuse, sujette à accident, mal-fonctionnement, sabotage et vol terroriste : c’est un miracle que nous ayons été épargnés jusqu’à présent, la lecture de Command and control d’Éric Schlosser (2013) nous en convainc aisément.

Les Libéraux ont répété sous tous les tons l’argument qu’ils étaient à la tête de 159 pays voulant stopper le matériel fissile, sans pouvoir expliquer pourquoi, s’ils s’attaquent aux « munitions », ils n’ont pas le courage de s’attaquer aux armes (alors qu’une motion déposée par Judith Berlyn dans le comté de Westmount avait été adoptée en ce sens au Congrès de 2015), ni celui de reconnaître que l’OTAN et Trump leur lient les mains par un chantage auquel ils succombent honteusement.

Le débat de jeudi a  mis en vedettes les députés NPD Linda Duncan (qui s’est même rendue à New York le 27 mars pour les discussions de l’ONU), Murray Rankin, Anne-Minh-Thu Quach, Alexandre Boulerice, Sheri Benson, Sheila Malcolmson (rappelant les arguments de Rosalie Bertell et Ursula Franklin), Wayne Steski (vantant le pacifisme des Doukhobors et des Quakers, celui de Muriel Duckworth mère de notre cinéaste Martin), Pierre-Luc Dusseault appuyé par Pierre Nantel et enfin Roméo Saganash. Chacun arrivait avec ses arguments en béton, avec le dernier plutôt imparable : le Canada, qui cherche à retrouver un siège sur le Conseil de Sécurité, retire quel avantage de boycotter des discussions où 132 pays qui voteront réclament en vain sa participation? Même les Pays-Bas, pourtant membres de l’OTAN et disposant d’armes nucléaires américaines sur leur territoire,  a été présent sous la pression de son Parlement. Alors pourquoi pas le Canada? Le pays de Pierre-Elliott Trudeau, ferme avocat de l’élimination des armes nucléaires pour le bien humanitaire de la planète??

Samedi il y aura une marche organisée par Femmes d’origines diverses et le nouveau Mouvement Québécois pour la Paix: j’y prononcerai un discours à leur demande. Voir http://www.artistespourlapaix.org/?p=13509

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[1] Françoise Guénette est journaliste indépendante et animatrice. Elle a été reporter à la radio de Radio-Canada, co-rédactrice en chef du magazine La Vie en rose et animatrice de quelques émissions de télévision dont Les Temps modernes à Radio-Canada, Option Éducation à RDI et Droit de parole à Télé- Québec. Elle vit à Québec où elle a été de 2001 à 2011 chroniqueuse à la revue de presse à la radio matinale de Radio-Canada. Elle collabore à l’occasion au magazine L’actualité. Depuis 15 ans, elle anime régulièrement des assemblées publiques et débats portant sur des enjeux sociaux, politiques et culturels. Parmi ses principaux clients : le Musée de la civilisation de Québec, le Commissaire à la santé et au bien-être du Québec, le Ministère de la Santé et des Services sociaux, Centraide Québec Chaudière-Appalaches, le Salon international du livre de Québec, l’ACFAS, le Ministère de la Culture et des Communications du Québec, le Secrétariat à la condition féminine du Québec, l’Université Laval (relations industrielles), la Société d’habitation du Québec, le canal Savoir…