Désarmants Artistes pour la Paix
Chapitre 3
ARTISTES POUR LA PAIX, enseignants comme étudiants, nous avons tenté d’informer respectueusement la population de certaines échéances destructives. Car les responsabilités sont claires depuis 1987, lorsque parut le Rapport Brundtland intitulé Notre avenir à tous, commandé par l’ONU – commission mondiale sur l’environnement et le développement – et traduit en français par des Québécois, en avant-garde des autres communautés francophones.
L’idée du « développement durable » naquit, précisée par le prophète de l’écologie au Québec, Pierre Dansereau, qui corrigea « durable » par « viable » à l’occasion d’un événement pacifiste des Artistes pour la Paix avec Richard et Marie-Claire Séguin, Michel Rivard, Kashtin, Maryvonne Kendergian, Arthur Lamothe, etc. qui remplit le Spectrum de Montréal en 1991 en protestation contre la première guerre d’Irak. La seconde sera déclenchée par la falsification des données de l’ONU par les États-Unis et l’Angleterre. La vie devenait urgemment la valeur à respecter avant tout pour tout développement! L’idée fut reprise par la CEQ, présente à cet événement comme les chefs de la FTQ et de la CSN. Monique Fitz-back créa les écoles vertes Brundtland au Québec. Les professeures environnementalistes à l’UQAM Lucie Sauvé et Louise Vandelac affirmèrent que « développement » ne devait plus signifier « croissance économique », sinon on entretiendrait l’illusion d’une situation prise au sérieux par les gouvernements.
Membre des Artistes pour la Paix, de 1990 à sa mort survenue quelques jours avant d’être centenaire, Pierre Dansereau [1], « favorisait un renversement radical de notre conscience rigide dualiste du monde, de nos mentalités de possédants, pour accueillir une mutation vers une nouvelle culture de compassion et de quête spirituelle, alliant les sciences et les arts ». Le progrès ne signifiait plus accumuler des marchandises, mais la sagesse de renoncer progressivement à l’amiante, au nucléaire, au pétrole, aux OGM de Monsanto et surtout aux armes de destruction massive.
Lors de la Déclaration de Vancouver de 1990 Actes du colloque de l’UNESCO « La science et la culture pour le XXIe siècle : un programme de survie », le professeur Dansereau plaide en faveur de l’austérité joyeuse [2] dans notre monde occidental de richesses et de surconsommation, afin de venir en aide aux pays du Tiers-Monde, comme on les appelait avant leur désignation de pays en développement. Cet idéal sera repris par les APLP Serge Mongeau et feu Dominique Boisvert, sous l’appellation de simplicité volontaire, mais aussi par Hervé Kempf de Reporterre.org, qui se déclare honoré de sa filiation à Dansereau, lorsqu’il parle de sobriété intelligente.
Premier chercheur à inclure dès les années soixante l’humain dans l’équation de l’écologie, Dansereau a reçu des doctorats honorifiques d’une quinzaine d’universités à travers le monde. Il nous invite à abandonner l’égoïsme pour un écocentrisme, comme nous y engagent à sa suite les chercheurs Normand Brunet, Paulo Freire Vieira, René Audet, Corinne Gendron, Isabel Orellana, Marie Saint-Arnaud, Lucie Sauvé et Louise Vandelac, de même que le manifeste populaire de l’Élan Global [3] qui a influencé le Leap Manifesto de Naomi Klein pour contrer la politique des petits pas insuffisants (caricature d’André- Philippe Côté).
Le 6 février 2008, le président des APLP organise à l’UQAM, avec Louise Vandelac, directrice de l’Institut des Sciences de l’Environnement, une soirée intitulée Guerres et écocides à laquelle se pressent trois cents auditeurs : huit conférences présentées par l’écrivain Dany Laferrière et introduites par Michelle Nevert, présidente du Syndicat des professeures et professeurs de l’UQAM (CSN-SPUQ).
Trois savants de Pugwash-Canada (Toronto) y font des présentations en anglais :
■ la présidente de Pugwash-Canada, Adele Buckley, très présente au comité exécutif des Conférences Internationales Pugwash sur la Science et les Affaires mondiales à Londres, ainsi qu’en divers pays au gré des années;
■ le physicien nucléaire natif de Grande-Bretagne, professeur de l’Université de Toronto, Derek Paul, maintenant nonagénaire et montréalais, qui a co-fondé Science for Peace et écrit A Leap to an Ecological Economy (un bond vers une économie écologique);
■ le militaire spécialiste et prosélyte des Casques Bleus de l’ONU, professeur au Collège Militaire Royal de Toronto, Walter Dorn, auteur de Keeping Watch: Monitoring Technology and Innovation in UN Peace Operations (2011) qui viendra prononcer des conférences à Montréal, entre autres pour le Forum social mondial.
S’y joignent, outre les professeurs de l’UQAM Louise Vandelac et Pierre Jasmin :
■ Dimitri Roussopoulos, v.-p. APLP de 1984 à 1992, premier éditeur des écrits politiques de Noam Chomsky à Black Rose Books; il préside alors les Citoyens pour un Ministère de la Paix. Il avait fondé en 1962 la Confédération internationale pour le Désarmement et la Paix à l’Université d’Oxford, regroupant les mouvements de paix non-alignés de vingt pays pour contrebalancer le Conseil Mondial de la Paix prosoviétique : l’ICDP a été parmi les premiers protestataires contre l’invasion de la Tchécoslovaquie et à y encourager la résistance). Il cofonde avec Jasmin au Québec la Coalition Québécoise pour le Désarmement et la Paix, avec le même objectif;
■ Dr. Éric Notebaert, urgentologue à l’Université de Montréal, alors président des Physicians for Global Survival, toujours actif en 2022 pour la cause;
■ Aude-Emmanuelle Fleurant, docteure en sciences politiques de l’UQAM et une des actuelles directrices du SIPRI – Stockholm International Peace Research Institute qui fournit annuellement les statistiques horribles des dépenses mondiales d’armement : autour de 2100 milliards de $ en 2021, en augmentation pour la première fois depuis quelques années, puisque le complexe militaro-médiatico-industriel a réussi à museler l’opposition pacifiste.
Le colloque uqamien Guerres et écocides 2008 lance le Mouvement Sortons le Québec du Nucléaire, qui restera très actif, jusqu’à la décision de fermer la centrale Gentilly 2 prise par le nouveau gouvernement de Pauline Marois en 2012.
Quelques activités artistiques militantes des APLP
Le 40e anniversaire du bed-in de John Lennon et Yoko Ono fêté par la directrice dynamique Nathalie Bondil du Musée des Beaux-Arts de Montréal est souligné par une série d’événements, auxquels se joignent les Artistes pour la paix. Ces événements se tiennent sous l’égide de l’exposition Imagine – La balade pour la paix de John & Yoko, ouverte en soirée, par exception, jusqu’au 30 mai 2009. Coral Egan, Mara Tremblay, Catherine Major, Catherine Durand, Samian, Carolyne Jomphe, Marie-Ève Maréchal, Hugo Lévesque, Marie-Marine Lévesque, Dominique Lévesque, Manuel Brault et Alexandre Désilets membres du regroupement pacifiste, misent sur la musique, les chansons et les poèmes pour faire passer le message de paix. Sylvie Paquette : « C’est un plaisir de s’associer à cet événement », a souligné la chanteuse, militante pour la paix. « On peut faire la différence en s’engageant. Moi, c’est par la chanson. Il faut ouvrir l’esprit des gens, dire ce que l’on peut faire pour la paix, signifier que c’est par la paix et non la violence que l’on peut régler les choses », a plaidé l’auteure-compositrice-interprète québécoise. Elle sera aussi présente le jour de l’anniversaire à l’hôtel Reine-Élizabeth (qui a passé à l’histoire avec le bed-in pour la paix de 1969), pour interpréter quatre chansons sur les ondes d’Espace musique (Radio-Canada). La chaîne musicale dévoile son palmarès des dix plus belles chansons sur la paix et présente le célèbre lit de La Petite Vie. Elle présente trois émissions depuis la verrière du musée, dont la première avec le pianiste québécois et président des APLP Pierre Jasmin, ainsi qu’avec le chanteur manitobain Daniel Lavoie, ce dernier choisi tout premier APLP de l’année 1989, en partie à cause de sa chanson Ils s’aiment (enfants de la bombe, des catastrophes, de la menace qui gronde…). L’exposition attire plus de 150 000 visiteurs. Les visiteurs peuvent contempler 140 œuvres du célèbre couple mais sont aussi invités à participer aux nombreux événements musicaux des APLP organisés toute la semaine par leur v-p Dominique Lévesque.
En 2008-9, des spectacles d’arts pour la paix s’organisent bénévolement sous l’impulsion de Daniel-Jean Primeau et Dominique Lévesque, vice-présidents des APLP avec la collaboration de Geneviève LeBel: sont offerts 25 concerts, événements ou spectacles à l’occasion de notre 25e anniversaire – La Presse en a mentionné un seul mais en taisant qu’il avait été organisé par les APLP. Et pourtant les Fernand Ouellette (Grand prix Leopold Senghor 2008, premier poète québécois à recevoir cette importante distinction), Marie Laberge, Jean-Guy Moreau, Florence K, Samian, Natalie Choquette, Dan Bigras, Richard Séguin, Yvon Deschamps, Judi Richards, le regretté Jean-Guy Moreau, Mario Bruneau, Hélène Cardinal, le sculpteur Armand Vaillancourt APLP de l’année 1993, Annie Roy, Laure Waridel, Raoûl Duguay, Marie-Mai, Serge Bouchard, Claude Lafortune, Nabila ben Youssef, Philippe Laloux, Ève Cournoyer, Yves Desrosiers, Bruno Roy, Alexandre Désilets, Daniel Lavoie, Édith Butler, Catherine Major et une trentaine d’autres artistes participent à ces événements réalisés par les APLP.
À peine une semaine après le dépôt le 18 mars de la pétition de la page suivante que Pierre Jasmin avait lancée avec le co-chef de Québec Solidaire Amir Khadir, Hydro-Québec annonce l’abandon de l’achat irresponsable de la centrale vieillissante Pointe-Lepreau que le gouvernement fédéral devra ensuite aider pour des réparations dépassant le milliard de $, qui auraient été à charge du Québec, si on n’avait pas exigé la correction de cette immense bévue possible. Les critiques d’Hydro-Québec s’atténueront, par exemple de la part de Christine Beaulieu et Annabel Soutard (J’aime Hydro) nommées avec Pascale Bussières artistes pour la paix de l’année 2020.
Le reste de nos demandes obtiendra des réponses positives grâce à la pétition du docteur Amir Khadir, sauf le radon trop présent dans les sous-sols des domiciles québécois.
A lieu le 22 avril 2012 une célébration du Jour de la Terre avec un quart de million de participants rassemblés à l’incitation de Dominic Champagne, qui venait d’être nommé APLP2012 et de Frédéric Back qui plante un arbre (sur la photo, on voit l’avant-garde esthétique de cette manifestation qui envahira peu après les contreforts du Mont-Royal).
Un an auparavant, deux futurs ministres manifestaient dans la rue.
La première du film Gentilly or not to be, retardée jusqu’après l’élection par l’influence occulte du Parti Libéral de Jean Charest, attire plusieurs ministres du nouveau gouvernement péquiste qui agira en fermant promptement la centrale dès décembre 2012.
Il est résolu que l’Assemblée générale des APLP réunie le 15 septembre 2014 à l’Espace GO à Montréal, exige que le ministre de l’Environnement David Heurtel
■ S’OPPOSE au projet d’inversement du flux de la ligne 9B d’Enbridge;
■ S’OBJECTE à la construction de l’oléoduc Énergie-Est de TransCanada;
■ ET EXIGE l’arrêt immédiat des travaux de construction d’un port pétrolier à Cacouna. 100% de succès… jusqu’à ce jour !
La plus haute responsable du dossier climatique aux Nations unies, Christiana Figueres, a déclaré : « Les partisans de l’exploitation du pétrole des sables bitumineux comme le Québec et le Canada font fausse route et restent prisonniers de la vieille économie, alors que les autres progressent dans une économie mondiale en voie de réduire sa dépendance aux énergies fossiles ».
La secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques a poursuivi en demandant à Messieurs Couillard et Harper : « Voulez-vous vous situer du bon côté de l’Histoire et du bon côté de la logique économique ? »
ALORS, QU’ONT-ILS RÉPONDU, NOS DÉLINQUANTS CORROMPUS PAR LE PÉTROLE ? HON…
À Montréal, plus qu’ailleurs, la Marche Mondiale contre le réchauffement climatique mobilise (voir photo) la danseuse Margie Gillis, qui vient d’être choisie officière de l’Ordre du Canada vendredi le 12 septembre et l’humoriste Yvon Deschamps (Ordre du Québec), souriant sous la bannière des Artistes pour la Paix. L’organisme, qu’ils ont cofondé ensemble en 1983, est alors présidé par la jeune cinéaste Guylaine Maroist, au centre, assistée par les deux vice-présidents Judi Richards et Pierre Jasmin; c’est un discours de ce triumvirat qui a l’honneur de lancer cinq mille manifestantEs dans les rues de Montréal pour la première de plusieurs marches pour le climat.
21 septembre 2014
JOURNÉE INTERNATIONALE POUR LA PAIX (ONU)
PEOPLE’S CLIMATE MARCH
Le 26 septembre 2017, jour de l’élimination totale des armes nucléaires ONU, un récital-conférence se tient salle Marie-Gérin-Lajoie de l’UQAM avec l’aide de Lucie Sauvé, professeure émérite au Département de didactique de l’Université du Québec à Montréal, où elle est également directrice du Centre de recherche en éducation et formation relatives à l’environnement et à l’écocitoyenneté – Centr’ERE. La soirée est parrainée par la Commission canadienne pour l’UNESCO grâce à l’intervention de Louise Vandelac. Cette dernière, professeure titulaire qu’on a déjà présentée, préside la Commission sectorielle sciences naturelles humaines et sociales de la Commission canadienne pour l’UNESCO et siège au Conseil scientifique international de la MRSH de Caen et du Réseau national des Maisons des sciences de l’Homme en France. Chercheure au CINBIOSE, elle codirige VertigO, première revue scientifique électronique de la francophonie en sciences de l’environnement.
À l’AGA de septembre 2016, quinze artistes pour la paix collaborent par leurs nombreux engagements au Forum Social Mondial où on assiste à la conférence de Walter Dorn sur le sabotage des Casques Bleus par le gouvernement, même si sa position de professeur au Collège militaire de Toronto ne lui permet pas d’utiliser ce vocabulaire. On reconnaît à gauche le webmestre Christian Morin et Daniel Gingras, à droite la vice-présidente Judi Richards, André Michel et le professeur Derek Paul. Au centre, Yolande Michaud, Pierre Jasmin, Camille Pelletier, Izabella Marengo, le trésorier André Cloutier, Odette Bougie et Lilya Prim-Chorney en chemise blanche.
Diverses formules (musique, diaporamas APLP) seront employées, par exemple au Musée des Beaux-Arts de Montréal le 16 février 2018 pour la rencontre le pouvoir des arts de Jean-Daniel Lafond devant son Excellence Michaëlle Jean, madame Nathalie Bondil et le président de l’Office National du Film, Claude Jolicoeur. Un diaporama est aussi présenté le 27 mars 2018 pour la section Amnistie internationale de St-Jean-sur-Richelieu.
La Voix des Femmes (Tamara Lorincz et Janis Alton) a reproduit et diffusé la courbe sinistre illustrée par ce graphe du Receveur général du Canada qui montre combien nos gouvernements conservateurs et libéraux ont, depuis 1997, prioritairement gaspillé, sous la pression du complexe militaro-médiatico-industriel aux mains des riches 1%, plus de seize fois davantage de fonds au département de la Défense que pour l’Environnement. Or, quand on investit dans la guerre, on obtient la guerre !
Au Québec, la chercheure de l’UQAM Laure Waridel et la cinéaste et autrice Anaïs Barbeau-Lavalette APLP 2012 ont fondé le mouvement Mères au front qui a recruté entre autres Sara Montpetit. Ce nouveau mouvement se déclarait avec force, en mai dernier, solidaire des femmes ukrainiennes assaillies de toutes parts. En se connectant à Voices of women, comme le faisait Simonne Monet-Chartrand APLP1991 qui se rendait à Moscou pour dialoguer avec les autorités communistes, Mères au front lutterait à nos côtés, pour une meilleure diffusion du combat pour la paix face aux réalités guerrières sordides de la guerre en Ukraine, et aiderait à changer peut-être les politiques militaristes de la Chambre des Communes complice de l’OTAN.
Les APLP continuent leur solidarité indéfectible avec le mouvement écologique, qu’il soit représenté par le pragmatique Éric Ferland de Projet ÉCOSPHÈRE ou la figure incorruptible d’André Bélisle à la tête de l’Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique : notre article dénonçait nos quotidiens incapables de voir la nocivité des changements climatiques, le jour même où l’ouragan Fiona touchait notre côte est et au lendemain de grandes manifestations de notre jeunesse inspirée par la thématique des vendredis de grève. La grande marche de novembre 2018 montre les sacrifices consentis par la jeunesse par grand froid.
Puis un demi-million de manifestants inspirés par la militante Greta Thunberg, venue rencontrer son plus grand succès mondial à Montréal (on admirera la photo dans la partie 6), profiteront d’une magnifique journée de fin septembre en 2019 et nous en serons, aux côtés des militants de la Déclaration citoyenne universelle d’urgence climatique, la DUC co-organisatrice de l’immense marche.
[1] Le Pavillon des Sciences de l’Université du Québec à Montréal est nommé en son honneur.
[2] L’espoir malgré tout, Presses de l’Université du Québec : témoignage de P. J. Pages 92 et 93.
[3] http://www.artistespourlapaix.org/?p=7056 par Dominic Champagne, Éric Pineault, Laure Waridel et Annie Roy, entre autres, inspirés par le Refus Global de Borduas en 1948.