Le 13 juin 2015, un « comité des sages » s’est rassemblé autour de l’environnementaliste de réputation internationale Bill McKibben (350.org) : André Bélisle, l’ex-ministre Camil Bouchard, Dominic Champagne, Domlebo, Pierre Jasmin (photographié assis devant une œuvre de René Derouin), JiCi Lauzon, Karel Mayrand, Annie Roy, Laure Waridel… ont harangué 300 personnes qui avaient payé 35$ pour être sous la tente à la TOHU à boire leurs paroles. Aucun média, hélas, n’en a rendu compte.

Photos: Michel Lamarche

Photos: Michel Lamarche

Et pourtant la visite du très grand militant écologiste McKibben en aurait valu la peine. Le premier qui ait alerté dès les années 80 le monde sur le réchauffement climatique accéléré, il nous avait montré plus tôt en après-midi ses diapositives d’autochtones des îles du Pacifique (hélas promises à être submergées par l’océan vu la fonte des calottes glaciaires) en train d’immobiliser un immense cargo australien chargé du charbon pour le Japon aggravant le réchauffement climatique mondial. Ses diapositives de manifestations PARTOUT dans le monde, dont celle gigantesque de New York le 21 septembre dernier appelée par l’ONU, mais aussi de pays d’Afrique centrale, d’Amérique du Sud et d’Asie (il s’est déplacé en 188 pays!) nous montrent que l’inquiétude climatique n’est pas le fait de savants blancs dans leur bulle, mais que ce sont nos politiciens qui sont déconnectés du monde. Car le combat écologiste est maintenant le fait de l’humanité entière, consciente que derrière toutes les statistiques alarmantes, sa survie en dépend. M. McKibben a d’ailleurs promis une belle déclaration papale pour jeudi prochain!

Bill n’est donc pas que pessimiste : il a été vivement impressionné que le Québec se soit levé le jour de la Terre en avril 2012, que les autochtones aient bloqué le projet de pipeline d’Alberta vers la côte de la Colombie-Britannique et que ses propres représentations auprès d’Obama aient réussi à bloquer la route du pétrole des sables bitumineux vers le sud. Il nous enjoints tous et toutes à la désobéissance civile pour maintenant bloquer Énergie-Est! Il sait aussi éclairer ses présentations de touches d’humanité et d’espoir, par exemple au Bangladesh où les gens menacés par les changements climatiques se sont convertis en masse à l’énergie solaire, encore davantage que les Allemands pourtant exemplaires, et tous profitent d’avantages technologiques extraordinaires qui font que le prix de l’énergie solaire a diminué de 90% en vingt-cinq ans. Au Danemark, 40% de l’énergie est désormais produite par des éoliennes.

Le vice-président des APLP a tenu pour sa part à évoquer le chiffre du Haut-Commissariat de l’ONU d’une cinquantaine de millions de réfugiés à travers le monde, la plupart à cause des guerres, mais de plus en plus composés de réfugiés climatiques. Il a soutenu devant la foule que si certains nous trouvaient radicaux, il fallait le prendre comme un compliment, puisque radical fait référence aux racines. Après le vibrant éloge par Dominic Champagne de la Révolution Tranquille et d’Hydro-Québec dans les années 60, il a rappelé qu’il a néanmoins fallu attendre quarante ans pour voir arriver la Paix des Braves avec les Cris et combien les autochtones, proches de la terre et de l’eau des lacs, des rivières et des fleuves, nous donnent des leçons dans la protection de la planète en s’opposant au pétrole et au nucléaire : exemple, il y a un mois, le Symposium international de Québec sur l’uranium organisé par l’exemplaire militant Ugo Lapointe avait reçu 42 000$ de la part des Cris. Éric Ferland, à sa question s’il avait reçu un montant approchant pour son Projet Écosphère, a émis un sourire pathétique, tout en faisant énergiquement non de la tête.

Ayant signé et fait signer le Manifeste de l’Élan global (une cinquantaine des 200 signatures publiées par Le Devoir lors de son dévoilement provenaient de membres des Artistes pour la Paix), il a aussi évoqué la pétition des APLP avec Judi Richards et Yvon Deschamps comme premiers signataires contre les industries de mort qui fabriquent des bombes nucléaires, des F-35 et des drones avec nos sous (Sun Life Financial y a investi des milliards de $ depuis 3 ans…).

En tant que membre de l’exécutif de Pugwash et professeur honoraire de l’UQAM, Pierre a annoncé que du 9 au 11 juillet prochains en Nouvelle-Écosse, sera commémoré le 70e anniversaire des bombardements de Hiroshima-Nagasaki, mais aussi célébrés le 70e anniversaire de l’ONU, en même temps que le 60e anniversaire d’un autre manifeste : en 1955, celui d’Einstein-Russell marqua une véritable révolution dans la pensée des scientifiques jusque là toujours fiers des progrès de la science, en inscrivant l’avertissement aux savants nucléaires rassemblés par le physicien Josef Rotblat : « Souvenez-vous de votre humanité, et oubliez tout le reste! ».

En s’excusant d’être pacifiste parmi des écologistes mais en clamant la nécessité de cette alliance, le vice-président a vanté l’organisme ICANW.org qui a rassemblé 109 pays derrière l’appel humanitaire contre l’arme nucléaire du ministre autrichien des Affaires extérieures. Devant les centaines de personnes présentes, y compris la porte-parole de Projet Écosphère 2015, la comédienne Maxim Roy qui s’est déclarée émue, il a ensuite évoqué combien les pétrolières, le pipeline nord-est, plusieurs médias et les armées nord-américaines étaient connectés avec des buts guerriers contre la Russie ou ailleurs. André Bélisle a renchéri sur cette thèse en rappelant que durant la guerre du Golfe, la consommation de pétrole aux USA avait doublé pour nourrir porte-avions, bombardiers, tanks, destroyers etc… Des riches détruisent la paix pour faire plus d’argent…

Domlebo a bien traduit le sentiment général en écrivant le lendemain :

«  on est rendu là…
être radical…
être radicaux…
partir de la base, des racines, de la terre…

bonne journée aujourd’hui dimanche

on pousse pour l’élan global…

on sort les gens de leur fauteuil et de devant leurs écrans…

on se met toutes et tous ensemble…

rendez-vous le 5 juillet à lac-mégantic en tout cas…
Bill l’a dit, les yeux du monde nous regardent 
»

Dès dimanche le 14 juin, Pierre Jasmin a rameuté le comité des sages, auxquels s’est jointe la professeure de l’UQAM écologiste Lucie Sauvé, qui venait de livrer une conférence magistrale dans l’après-midi pour Projet Écosphère. Pour elle et Camil, il y a urgence de présenter un projet acceptable de définition de l’acceptabilité sociale, sinon le gouvernement va procéder impunément à « la fabrication du consentement » – Les réalisateurs de ce documentaire sur Noam Chomsky avaient réquisitionné Pierre Jasmin, alors qu’il était président des APLP, en une tournée des radios en 1992 pour faire la publicité et l’éloge de ce film de l’ONF qui allait surpasser en ventes le célèbre Si cette planète vous tient à coeur oscarisé puis censuré aux États-Unis de Reagan, mettant en scène la docteure australienne Helen Caldicott (que Pierre a eu l’honneur de présenter au Symposium de Québec il y a un mois) -.

Merci à Éric Ferland d’avoir invité Bill Mckibben, scientifique détenteur d’une vingtaine de doctorats honorifiques qui dès le début a rassemblé la planète autour d’un objectif chiffré (langue universelle arabe!) plutôt que de mots trop circonscrits à une langue donnée, d’où la naissance du groupe international 350.org. Ce chiffre est basé sur un calcul de ppm/CO2 fait par le docteur James Hansen : nous dépassons les 400, alors que la planète réclame 350, pour éviter un réchauffement qui par exemple dégagerait le méthane du pergélisol de l’Arctique entraînant une spirale incontrôlable de réchauffement. Ce sera un objectif poursuivi par l’ONU à Paris en décembre prochain où le Canada et le Japon s’annoncent comme les cancres de l’environnement.

 

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photos Michel Lamarche

Deux exemples de folles actions que nous admirons

a)  Le surlendemain de la soirée des sages, deux activistes ont grimpé sur une tour appartenant au Canadien Pacifique, la seule compagnie ayant refusé sa participation à des dédommagements pour le désastre de Lac-Mégantic, causé par l’explosion de wagons de pétrole, pour déployer une gigantesque banderole visible à un kilomètre à la ronde. Leur geste courageux n’est pas passé inaperçu par les médias électroniques avides de spectaculaire.

Photo Agence QMI

Photo Agence QMI

b)  Reçu de Greenpeace

L’artiste et activiste des Premières Nations, Audrey Siegl, se trouve à bord d’une petite embarcation pour affronter dans les eaux canadiennes, au large de la Colombie-Britannique, la plateforme de forage de Shell, haute de plus de 100 mètres, alors qu’elle se dirigeait vers les côtes arctiques de l’Alaska.

En soutien à l’acte courageux d’Audrey, des activistes de Greenpeace Canada sont descendus dans l’eau derrière elle, bloquant le passage de l’imposante plateforme. Ils sont toujours en position, faisant physiquement face à la plateforme, pour transmettre un message clair : Non au forage dans l’Arctique! #ShellNo

Ajoutez votre voix à plus de 7 millions de défenseurs de l’Arctique.

Avant de quitter le bateau de Greenpeace MY Esperanza, Audrey m’a demandé de vous livrer ce message : « Shell a peut-être l’argent et des machines gigantesques, mais c’est la solidarité des gens qui est le plus puissant. Ensemble, nous mettrons fin aux plans de forage dans l’Arctique pour défendre nos côtes et notre climat ».

audrey_shell

Audrey est convaincue – et je parie que vous l’êtes aussi – que les côtes et l’Arctique valent la peine d’être sauvés. Aujourd’hui, face à cette gigantesque machine de forage, elle était minuscule en apparence, mais très défiante. Elle a agi au nom des sept millions de défenseurs de l’Arctique et des communautés des Premières Nations qui vivent le long des côtes et qui sont opposés à l’exploitation du pétrole dans l’Arctique.

Jusqu’à maintenant, Shell ignorait l’appel des millions de personnes à travers le monde qui appuient la protection de l’Arctique et s’opposent au forage. Mais la pétrolière ne pourra plus ignorer ces voix plus longtemps parce que les gens ordinaires refusent de rester les bras croisés et se soulèvent pour attirer l’attention internationale sur ces projets de forage.

28 septembre: dernière heure!!!

Chers Artistes pour la Paix (et autres supporteurs…),

J’étais impatiente de vous annoncer la bonne nouvelle : Shell vient juste d’annoncer qu’elle abandonnait ses plans de forages en Arctique au large de l’Alaska ! Une victoire pour nous tous, et qui n’aurait pas été possible sans votre soutien. Aussi, je voulais vous adresser un grand merci ! Merci d’avoir été des nôtres, d’avoir envoyé un message fort, que la compagnie ne pouvait tout simplement pas ignorer.

Malgré le départ de Shell, l’Arctique est toujours menacé par la prospection pétrolière. Mais après 3 années et 7 milliards de dollars dépensés sur un projet qui n’aura finalement pas porté fruit, Shell annonce qu’elle n’a pas les ressources suffisantes pour continuer son aventure folle en Arctique.

Le journal The Guardian rapporte par ailleurs qu’au-delà de la question des coûts associés à cette exploration, « Shell a fait savoir en privé qu’elle avait été prise de court  par les manifestations publiques d’opposition à ses projets de forage, celles-ci risquant de ternir sa réputation ».

Quand nous avons lancé cette campagne il y a  trois ans, nous ne savions pas comment les choses allaient tourner. Le plus inspirant a été de voir le mouvement citoyen croître année après année, jusqu’à cette confrontation sur la côte ouest canadienne entre l’activiste autochtone Audrey Siegl, le Greenpeace Esperanza et la plateforme Polar pioneer de Shell, alors en route pour l’Alaska.

Dans cette reprise moderne de « David contre Goliath », nous avons vu de simples citoyens confronter ce géant pétrolier et gagner la bataille. Mais la guerre, elle, n’est pas terminée et nous devons continuer de confronter l’industrie pétrolière. Shell se retire de l’Alaska, mais d’autres compagnies ont les yeux rivés sur l’Arctique canadien. La communauté Inuit de Clyde River, au Nunavut, lutte toujours pour éviter les tests sismiques et la prospection pétrolière dans la baie de Baffin. Nous devons nous tenir à leurs côtés. Rejoignez-nous dans notre bataille pour protéger l’Arctique du forage pétrolier.

Il s’agit aussi d’un espace de vie pour de nombreuses populations et une faune unique, ainsi que d’une importante zone de migration pour les espèces marines.

Ce jour est à marquer d’une pierre blanche dans l’histoire de l’Arctique, mais nous ne devons pas perdre de vue que beaucoup de travail reste à faire pour sa protection. La santé de cette région du monde nous affecte tous. J’espère que vous ferez un don aujourd’hui pour participer à faire de ce jour de célébration la première étape vers la protection de l’Arctique, pour de bon.

Un ÉNORME merci pour tout ce que vous faites et nous permettez de faire !

Jessica Wilson, coordinatrice de la campagne Arctique, Greenpeace Canada

Autres sages réactions

Éric Ferland nous fait parvenir le 1er juillet le lien suivant : http://webtv.coop/media/embed?key=fe7ee9fc6c1a7a9318bebe9d967b7e3a&width=720&height=405&autoplay=false&autolightsoff=false&loop=false

 

« Le pape décrit très bien les enjeux liés à la perte de biodiversité »
Réaction de Hubert Reeves, président d’honneur de l’association Humanité et Biodiversité, suite à la publication de Laudato Si, la première encyclique d’un pape consacrée à notre rapport à l’environnement.

L’ENCYCLIQUE DÉCRYPTÉE PAR DES FRANÇAIS :
Philippe Chalmin :  » Réjouissant… malgré son appel à la décroissance  » ; Philippe Louis :  » Une encyclique qui tombe à pic « ; Pierre Larrouturou : « Loin d’une écologie punitive »; Haïm Korsia : « La Genèse n’invite pas à « dominer » la terre »; Mohammed Taleb : « Une occasion, pour chaque communauté religieuse, de relier écologie et spiritualité »; Jean-Marie Pelt : « Pour les chrétiens, une formidable session de rattrapage en écologie »; Tugdual Derville : « Un texte d’une légitime sévérité »; Mahaut Herrmann : « Un texte coup de poing, qui va servir longtemps »; Fabien Revol :  » Tout est lié: j’aime ce refrain qui parcourt l’encyclique »; Patrice de Plunkett : « Une joie catholique »; Mgr Marc Stenger : « Une création à préserver d’abord pour les pauvres »; Pierre Rabhi : « J’espère que ce texte aidera l’humanité à changer de direction »; José Bové, député européen :  » Un texte sans concession, qui engage fortement les chrétiens « ; Nicolas Hulot :  » Cette encyclique? Du pain bénit !  »