Version Radio-Canada
CBC/Radio-Canada annonce le 24 septembre en après-midi « que Meng Wanzhou pourra quitter le Canada, où elle était détenue en résidence surveillée depuis son arrestation à Vancouver en 2018. La Cour suprême de la Colombie-Britannique avalise une entente conclue entre la directrice financière de Huawei et le Département de la Justice aux États-Unis permettant sa libération conditionnelle en vertu d’un accord de suspension des poursuites. La juge Heather Holmes a signé la décharge de Meng Wanzhou, suivant la demande des procureurs de la Couronne de retirer la requête d’extradition. Mme Meng est libérée », a annoncé la juge. Plus tôt dans la journée, lors d’une comparution virtuelle depuis Vancouver devant la cour de district de New York, Meng Wanzhou a d’abord plaidé non coupable à des accusations de fraude.
L’avocat du procureur général des États-Unis a pour sa part présenté un accord de suspension des poursuites dans lequel Meng Wanzhou admet avoir sciemment menti à des membres de la Banque HSBC à propos des liens unissant Huawei et sa filiale Skycom, qui faisait affaire en Iran, lors d’une rencontre ayant eu lieu en 2013 à Hong Kong. En vertu de l’accord, le Département de la Justice des États-Unis avisera le ministre de la Justice du Canada du retrait de sa demande d’extradition contre Meng Wanzhou, a indiqué le procureur David Kessler du district de New York. Le gouvernement américain suspendra les poursuites pendant ce qui équivaut à une période de probation pour Meng Wanzhou, qui s’étendra jusqu’en décembre 2022. Si Meng Wanzhou se conforme aux exigences établies dans l’accord, les accusations de fraude portées contre elle seront retirées à la fin de cette période. Advenant qu’elle ne s’y conforme pas, elle pourra toujours être poursuivie. »
Réalité déshonorante pour le Canada
Radio-Canada s’abstient de souligner que le gouvernement canadien semblait totalement ignoré dans cette transaction qui s’est passée au-dessus de sa tête entre la Chine et les États-Unis, jusqu’à ce que le Premier ministre Trudeau annonce avec une grande satisfaction que les deux Michael étaient en route par avion vers le Canada. Pourquoi avoir laissé la réputation du Canada et ses liens se dégrader avec la Chine en jouant en décembre 2018 un rôle de caporal de Trump ? C’est la question à poser.
Depuis décembre 2018, les Artistes pour la Paix ont écrit sept articles en solo et avec le Mouvement Québécois pour la Paix, relatant les efforts de la juriste Louise Arbour et ceux de Ken Stone avec la Hamilton Coalition to Stop the War exigeant la libération de Meng Wanzhou, no2 de Hua Wei, détenue à Vancouver de façon abusive. Ces articles dont la plupart ont été publiés par l’Aut’Journal n’ont jamais été repris par la presse officielle. On se réjouit aujourd’hui de la libération précoce de Meng Wanzhou mais un non-emprisonnement aurait d’une part apaisé la sinophobie au Canada et démontré de la part de MM. Trudeau et de son ministre de la Justice Lametti un semblant d’épine dorsale, face à la grossière ingérence des États-Unis de Trump dans cette affaire extrêmement embarrassante pour le Parti soi-disant Libéral.
Évidemment, en se négociant une période de probation jusqu’en décembre 2022, les États-Unis s’éviteront pendant 14 mois (une période assez longue pour que le public ait tout oublié) une répétition de l’affaire Omar Khadr. Dans son cas, les Artistes pour la Paix avaient haut et fort plaidé sa libération auprès de Harper dès 2007 et auprès d’Obama dès 2008. Le malheureux, détenu à Guantanamo depuis ses quinze ans en dépit de toutes les conventions internationales des droits de l’homme et de l’enfant, avait dû s’avouer coupable en 2010 de cinq chefs d’accusation : (1) crimes de guerre, (2) meurtre du soldat américain Christopher Speer, (3) complot, (4) soutien matériel au terrorisme et (5) espionnage afin d’obtenir sa libération. Une fois en sécurité au Canada, il se rétracta puis obtint 10 millions de dollars de réparations de la part du gouvernement canadien resté trop longtemps indifférent à son sort.
Le Canada a-t-il suffisamment agi dans le dossier Meng Wanzhou pour qu’elle ne proteste pas en 2023 et pour que les deux Michael ne se tournent pas contre leur pays à cause de plus de deux ans et demi de leurs vies sacrifiées ?
La Campagne Pan-Canadienne pour Libérer Meng Wanzhou applaudit l’équipe juridique de Madame Meng qui a réduit en miettes les arguments de la Couronne en vue de son extradition, au point que, après avoir obtenu la publication de 300 pages de documents bancaires de la HSBC, elle a pu démontrer à la juge Holmes, aux médias, au cabinet Trudeau et au monde entier qu’aucune fraude n’avait été commise par Mme Meng ni aucun dommage occasionné à la banque.
Avec son cas en lambeaux, le ministère américain de la Justice a dû recourir à une offre rarissime aux États-Unis de poursuite différée, pour laquelle Madame Meng a plaidé non coupable de tous les chefs d’accusation, suite à quoi le gouvernement américain a retiré la demande d’extradition. Il semble également qu’aucune amende ou compensation ne sera versée par Mme Meng ou sa société aux autorités américaines.
Il n’est donc pas étonnant que les gouvernements américain et canadien aient programmé l’échange de prisonniers un vendredi après-midi, le nadir du cycle hebdomadaire des nouvelles! De toute évidence, le plan Trump d’emprisonner Mme Meng pendant des décennies sur la base d’accusations forgées de toutes pièces de fraude bancaire afin d’écraser la compagnie Huawei a subi un revers majeur.
Ce fut aussi un revers pour une tentative américaine
1. d’exercer un contrôle extraterritorial sur d’autres pays comme la Chine, et
2. d’étrangler les économies de pays comme l’Iran, avec des mesures économiques coercitives.
La libération de Meng Wanzhou peut donc être considérée comme une victoire claire pour tous les gouvernements et organisations de paix qui travaillent à mettre fin à la pratique occidentale consistant à imposer des sanctions économiques unilatérales et illégales aux pays du monde qui ne se plient pas à la politique étrangère ou économique américaine.