Voici une Québécoise [1] qui travaille depuis des années comme directrice du programme Armes et Dépenses militaires à l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (en anglais, Stockholm International Peace Research Institute, SIPRI) [2]. Elle est une des conférencières invitées à la 5e édition du Forum Saint-Laurent le matin du vendredi 3 mai 2019 à l’Hôtel Le Concorde, Québec.
Interviewée en anglais à la télévision allemande par des reporters de l’Internationale Politik und Gesellschaft, elle est ignorée par nos médias (à l’exception de Sylvie Fournier de la SRC). Serait-ce pour éviter que le public obtienne de sa part, EN FRANÇAIS, des informations cruciales démentant la propagande antirusse de l’OTAN ? Cette propagande inspire notre ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland dans son opposition et celle de la Colombie au président Maduro du Venezuela et dans son soutien indéfectible au président corrompu Poroshenko, heureusement chassé du pouvoir par 75% de l’électorat ukrainien la semaine dernière. L’OTAN influence aussi notre ministre de la Défense, vétéran de l’absurde guerre en Afghanistan, dans ses dépenses récentes exorbitantes d’une soixantaine de milliards de dollars pour l’acquisition d’avions F-18 usagés australiens et pour la construction de navires de guerre par IRVING-LOCKHEED MARTIN [3].
Le 29 avril, le SIPRI a émis le communiqué suivant que j’ai à peine édité et qui illustre les dangers accrus d’une guerre mondiale :
Les dépenses militaires mondiales augmentent
à + de $1800 milliards en 2018
Le total des dépenses militaires mondiales s’élève à 1822 milliards de dollars en 2018, soit une augmentation de 2,6 % par rapport à 2017, selon les nouvelles données du SIPRI. Les cinq plus grands dépensiers – États-Unis, Chine, Arabie saoudite, Inde et France [4] – concentrent à eux seuls 60 % des dépenses militaires mondiales. En 2018, le total des dépenses militaires mondiales a augmenté pour la deuxième année consécutive, atteignant leur niveau le plus élevé depuis 1988 – première année pour laquelle des données mondiales cohérentes ont été disponibles. Les dépenses mondiales, désormais 76 % supérieures au niveau le plus bas de l’après-guerre froide, représentent 2,1 % du produit intérieur brut (PIB) mondial, soit l’équivalent de 239 $ par personne.
États-Unis et Chine en tête
Les dépenses militaires des États-Unis augmentent – pour la première fois depuis 2010 – de 4,6 % pour atteindre 649 milliards de dollars. Les États-Unis, de loin les plus grands dépensiers au monde, ont investi en 2018 presque autant que l’ensemble des huit pays les plus dépensiers qui les talonnent dans le classement. « L’augmentation des dépenses des États-Unis est imputable à la mise en œuvre dès 2017 de nouveaux programmes d’achat d’armement sous l’administration Trump », précise Aude Fleurant.
La Chine, deuxième plus grand dépensier au monde, a augmenté ses dépenses militaires de 5,0 %pour atteindre 250 milliards de dollars en 2018. Il s’agit de la vingt-quatrième année consécutive de hausse des dépenses militaires chinoises. En 2018, ses dépenses sont presque dix fois supérieures à celles de 1994 et représentent 14 % des dépenses militaires mondiales. Depuis 2013, la Chine alloue chaque année 1,9 % de son PIB aux forces armées.
Trois décennies de croissance en Asie et en Océanie
Les dépenses militaires en Asie et en Océanie augmentent chaque année depuis 1988. Avec un montant de 507 milliards de dollars, les dépenses militaires dans la région représentent 28 % du total des dépenses mondiales en 2018, contre seulement 9,0 % en 1988. En 2018, l’Inde augmente ses dépenses militaires de 3,1 % pour atteindre 66,5 milliards de dollars. Les dépenses militaires du Pakistan augmentent de 11 % (le même niveau de croissance qu’en 2017) pour atteindre 11,4 milliards de dollars en 2018.
Augmentation dans les pays d’Europe centrale et orientale, diminution en Russie
Plusieurs pays d’Europe centrale et orientale ont fortement augmenté leurs dépenses militaires en 2018. Les dépenses de la Pologne augmentent de 8,9 % en 2018, s’élevant à 11,6 milliards de dollars; tandis que les dépenses de l’Ukraine (Poroshenko) augmentent de 21 % à 4,8 milliards de dollars. Les dépenses de la Bulgarie, de la Lettonie, de la Lituanie et de la Roumanie augmentent également (passant de 18 % à 24%) en 2018. « Les augmentations en Europe centrale et orientale sont dues en grande partie aux sentiments grandissants [5] d’une menace russe », précise Pieter Wezeman, chercheur principal au programme AMEX du SIPRI. « Cela en dépit du fait que les dépenses militaires russes ont diminué au cours des deux dernières années. » À 61,4 milliards de dollars, les dépenses militaires russes sont les sixièmes plus élevées au monde en 2018. Ces dépenses ont diminué de 3,5 % par rapport à 2017.
Autres évolutions notables
- Le total des dépenses militaires des 29 membres (y compris le Canada) de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) s’élève à 963 milliards de dollars en 2018, soit 53 % des dépenses mondiales [6].
NDLR Voir aussi notre article OTAN suspens ton vol.
- Les dépenses militaires en Amérique du Sud augmentent de 3,1 % en 2018. Cela est principalement dû à la hausse des dépenses du Brésil (+5,1%), la deuxième augmentation annuelle consécutive pour le pays.
- Les dépenses militaires de la Turquie augmentent de 24 % en 2018 pour atteindre 19,0 milliards de dollars, soit en pourcentage l’augmentation annuelle la plus élevée du Top 15 des plus grands dépensiers au monde.
- Six des dix pays pour lesquels le fardeau des dépenses militaires sur la richesse nationales (en PIB) est le plus lourd se trouvent au Moyen-Orient: Arabie saoudite (8,8% du PIB), Oman (8,2%), Koweït (5,1%), Liban (5,0%), Jordanie (4,7%) et Israël (4,3%).
- Les dépenses militaires en Afrique diminuent de 8,4 % en 2018, ce qui représente une quatrième baisse annuelle consécutive depuis un pic enregistré en 2014.
* Tous les pourcentages sont exprimés en termes réels (prix constant 2017).
À l’attention des rédacteurs
Les dépenses militaires se réfèrent à toutes les dépenses publiques actuelles pour les forces armées et les activités militaires, y compris salaires et avantages sociaux, frais de fonctionnement, achats de matériel militaire et d’armes, infrastructures militaires, recherche et développement, administration centrale, commandement et soutien. Le SIPRI déconseille donc l’utilisation de termes tels que « les dépenses d’armement » en référence aux dépenses militaires, les dépenses d’armement ne constituant qu’une part mineure du total. [7]
[1] Aude Fleurant a été formée à l’UQAM par le regretté professeur Yves Bélanger, hélas non remplacé. En juin 2014, nous signalions « notre immense peine aux Artistes pour la Paix devant la disparition de ce chercheur infatigable qui n’hésitait jamais à nous faire part des aberrations multiples et dérives financières des « grands » projets du Ministère de la Défense. Notre dernière collaboration a été pendant la grève des professeurs de 2009, une conférence publique commune pour dénoncer l’accroissement indécent et les cibles irréalistes des dépenses militaires canadiennes de Harper. Yves avait aussi suggéré à Louise Vandelac et à moi, le 5 février 2008, une conférencière pour notre colloque intitulé Guerres et Écocides, Aude-Emmanuelle Fleurant. »
[2] Institut d’études stratégiques fondé le 6 mai 1966 dont la tâche est d’effectuer des études scientifiques au sujet de l’importance des conflits et de la coopération pour la paix mondiale, dans le but de contribuer à la compréhension des conditions nécessaires à la résolution pacifique des conflits internationaux et à une paix durable. Sipri expose le fruit de ses recherches dans des livres (les Sipri Yearbooks), des rapports de recherche ou par d’autres voies de publications comme le site internet de l’institution fabriqué en open source. Une mise à jour annuelle complète de la base de données du SIPRI sur les dépenses militaires est accessible dès aujourd’hui sur www.sipri.org.
[3] http://lautjournal.info/20190109/traversiers-ou-bateaux-de-guerre-ottawa-choisi
[4] Voici une donnée utilisée par des gilets jaunes dans leurs contestations, mais jamais reprise par les médias même de gauche inféodés à la richissime industrie militaire censurant toute information jugée pacifiste.
[5] Ces sentiments ont certes été nourris par la propagande militariste de l’OTAN.
[6] Plus de quinze fois le budget militaire russe qui selon l’OTAN menace l’Europe entière et le monde !
[7] La Corée du Nord est peu dans le portrait, ses statistiques restant du domaine du mystère ?
Un collègue de Pugwash, membre des Forces Armées du Canada, m’informe que les chiffres déjà énormes du budget militaire américain n’incluent ni:
– les 81 milliards de $ du budget des services secrets et de l’intelligence partagé par 17 organismes différents, certains envahissant la vie privée de citoyens à travers le monde, dénoncés par les lanceurs d’alerte Chelsea Manning, Edward Snowden et Julian Assange;
– ni les 24.8 milliards de $ annuels du budget nucléaire attribués au Ministère de l’Énergie;
– ni les dizaines de milliards de $ accordés à 600 000 contracteurs privés, telle la compagnie paramilitaire Blackwater du sinistre Edward Cheney pro-torture;
– ni enfin les 216 milliards de $ attribués aux Vétérans dont 2.7 millions de soldats ayant combattu en Irak et en Afghanistan : une partie importante d’entre eux souffrent de troubles post-traumatiques que les hôpitaux soignent (budget non disponible).
https://truthout.org/articles/the-us-is-spending-1-25-trillion-annually-on-war/